Après le succès international de son exposition sur le couturier Jean Paul Gaultier, le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) remet ça avec un formidable déploiement consacré à Thierry Mugler, couturier, photographe et metteur en scène français. Une symphonie de beauté signée par le commissaire Thierry-Maxime Loriot. Une première mondiale qui débute samedi.

Thierry Mugler a été une star de la mode et son étoile brille encore, 16 ans après la fin de son aventure dans la haute couture. Il avait toujours rejeté l'idée d'une exposition sur sa carrière. De grands musées de Londres, Paris et New York se sont fait dire non. 

C'est à Thierry-Maxime Loriot, le commissaire québécois qui s'est fait une solide réputation internationale avec ses deux expos sur Jean Paul Gaultier et Peter Lindbergh, que Montréal doit l'honneur d'offrir à la planète mode cette sorte de rétrospective sur Thierry Mugler, authentique génie contemporain à l'imaginaire singulier. 

«Thierry Mugler: Couturissime n'est pas une exposition sur une marque ou un logo, mais sur un artiste, créée avec cet artiste, dit Nathalie Bondil, directrice générale du MBAM. Cette exposition est un opéra que l'on traverse, pour découvrir ses visions de rêve.»

L'exposition resitue le parcours artistique de Mugler dans le contexte actuel. En admirant ses créations exposées pour la première fois, on réalise combien il a été avant-gardiste. Combien il a osé. Avec ce désir permanent de séduire qui a transporté son inspiration à la frontière du réel. 

Homme de scène (il a été danseur à ses débuts), il a pulvérisé les diktats de la mode pépère en se lançant dans des présentations de collections extravagantes et toujours au service de la beauté.

«Thierry Mugler n'a pas suivi les règles de la haute couture et de la mode, il a fait de l'art total», dit Thierry-Maxime Loriot. 

Le couturier a innové en utilisant des matériaux inédits pour des vêtements tels que le latex, le chrome ou le plexiglas. Il a inventé de nouvelles textures. Il faut voir la complexité des vêtements qui sont exposés, ce génie d'associer légèreté et solidité, courbes et lignes droites, pierres précieuses et plumes. 

Mugler est un aventurier dans l'âme et un couturier sculpteur. Ses mannequins sont des beautés statuaires émouvantes de grâce, d'élégance, de sensualité et d'une extravagance qui ne choque pas, mais surprend, voire émeut. Mugler est passé de la haute couture à la haute poésie.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

«Ce qui relie le parcours de l'exposition, c'est la joie de vivre, la passion et la recherche du meilleur», a dit hier Thierry Mugler.

D'ailleurs, les plus grandes vedettes ne s'y sont pas trompées. Diana Ross, Kate Moss, Ivana Trump, Demi Moore, Brian Ferry, Lenny Kravitz, Céline Dion, David Bowie, Kim Kardashian, Rihanna, Katy Perry, Lady Gaga, Beyoncé, Liza Minnelli, Mylène Farmer, Diane Dufresne, Grace Jones. Tous et toutes ont porté ses créations. 

En 2019, on contemple ces mannequins et si l'on y retrouve le charme féminin universel (l'espèce humaine est le plus beau des animaux, dit-il), Thierry Mugler a donné aux femmes un style moins stéréotypé et plus conforme à leur volonté d'être des femmes assumées, libres, ambitieuses, non soumises, voire dominatrices. Des superfemmes «muglerisées». 

Pour l'historienne de l'art, féministe et critique Linda Nochlin, les femmes ne sont pas des objets sexuels pour Thierry Mugler, mais des sujets sexuels au pouvoir irrésistible ! Forçant le trait avec souvent beaucoup d'humour, ce créateur qui a révolutionné la mode a souhaité transmettre confiance et joie de vivre. 

«L'art doit être vivant, a-t-il dit hier. Il se crée parfois dans la souffrance et la solitude, mais finalement, tout est lié à la passion, car ça en prend pour réaliser quelque chose.» 

Thierry Mugler: Couturissime, au MBAM, du 2 mars au 8 septembre.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Une des coiffes spectaculaires de Thierry Mugler, dans la salle «Belle de jour & Belle de nuit», avec ses silhouettes architecturales.