(Washington) Pendant plus de 10 ans, de par son emplacement entre la Maison-Blanche et le Capitole, le Newseum a fièrement rappelé l’importance de la presse en démocratie. À cet égard, la fermeture de ce musée à la fin de l’année est symbolique d’un secteur des médias en proie à de lourdes difficultés financières et aux attaques de responsables politiques.  

Connu pour sa collection de unes de journaux du monde entier et ses expositions sur le 11-Septembre ou la chute du mur de Berlin, l’établissement a annoncé début 2019 qu’il vendait son immense bâtiment. Situé sur la célèbre Pennsylvania Avenue à Washington, il était cédé pour 372,5 millions de dollars à l’université Johns Hopkins.

Le Freedom Forum, une association à but non lucratif, créée par le fondateur du quotidien national USA Today et qui gère le Newseum, a annoncé qu’il allait continuer sa mission d’éducation du public. Sans préciser si le musée allait trouver un nouveau bâtiment pour abriter sa collection.

« Le futur du Newseum est pour l’instant incertain », dit sa porte-parole Sonya Gavankar. « Cela va nous prendre au moins six mois pour désinstaller les expositions et les stocker dans nos archives. Une fois cette étape terminée, nous verrons ce que nous réserve l’avenir ».

Le premier Newseum a ouvert en 1997 à Arlington, dans la banlieue de Washington, avant de déménager en 2008 dans le cœur historique de la capitale américaine, avec vue imparable sur le Congrès et le « National Mall », l’avenue monumentale qui traverse la ville.

Malgré 10 millions de visiteurs en deux décennies, ce musée du journalisme, aux expositions très didactiques pour tenter de toucher un public le plus large possible, n’a pas survécu à la crise des médias.  

Des milliers de journaux américains ont fermé ces dernières années, faute de financements suffisants et à cause de la révolution numérique.

Le Newseum est en outre payant, alors que les plus grands musées de la capitale fédérale sont gratuits.

Liberté de la presse

Selon le Pew Research Center, un institut indépendant, le nombre de journalistes a chuté d’un quart au cours de la décennie. La baisse de moyens s’est conjuguée à une érosion de la confiance en les médias.

D’après un sondage de l’institut Gallup publié en septembre, seulement 40 % des Américains ont une confiance « grande » ou « correcte » dans les journaux, la télévision ou la radio.  Dans les années 1970, ils étaient plus de 70 %.

Les médias ont trouvé dans Donald Trump un adversaire redoutable, qui va jusqu’à les qualifier d’« ennemis du peuple ». Dans sa lignée, de nombreux dirigeants à travers le monde ont repris ce discours aux accents populistes pour convaincre leurs électeurs des méfaits de la presse.

Dans ce climat néfaste, le Newseum a cherché à défendre les cinq libertés énoncées dans le premier amendement de la Constitution américaine : libertés de religion, d’expression et de la presse, et droits de se rassembler et d’adresser une pétition au gouvernement.  Une mission à laquelle les visiteurs, venus des quatre coins des États-Unis et du monde en raison de la notoriété du musée, ont été sensibles.

Cathy Cawley, habitante d’Ashland, dans la banlieue de Washington, a expliqué à l’AFP vouloir visiter le musée une deuxième fois, notamment pour l’exposition rendant hommage aux journalistes assassinés pour avoir fait leur travail. « Ça m’a fait réaliser l’importance de la liberté de la presse », a-t-elle déclaré.

Julia Greenwald, professeure d’anglais dans une école de la capitale américaine, a pour sa part tenu à montrer le musée à ses jeunes élèves. « C’est triste qu’il ferme », a-t-elle dit. « C’est un des musées les plus cools de Washington », une ville qui en compte pourtant près de 70, estime-t-elle.