(Lyon) L’ex-électricien de Pablo Picasso et son épouse, jugés en appel pour recel par la justice française, ont soutenu mardi que les 271 œuvres de l’artiste entreposées dans leur garage étaient « un magnifique cadeau » de sa veuve.

Qualifiant leur version de « suspecte », l’avocat général Philippe de Monjour a réclamé à la cour d’appel de Lyon de confirmer la condamnation à deux ans de prison avec sursis des deux prévenus.

Déjà condamnés à deux reprises pour le recel de ces œuvres, Pierre et Danielle Le Guennec assurent désormais, après avoir soutenu en première instance que le don avait été fait du vivant de Picasso et avec l’accord de ce dernier, que les œuvres leur ont été remises après la mort du peintre.

Un changement de version « pour nos enfants, pour qu’ils n’aient pas d’ennui », s’est justifiée Mme Le Guennec, en fauteuil roulant.

« Madame m’a demandé de mettre chez moi des choses » au moment où la veuve était en litige avec les héritiers du peintre, a déclaré à la barre son mari. Plus tard, Jacqueline lui aurait demandé de les lui rendre, sauf un pour lequel elle aurait dit « Gardez-le, c’est pour vous », selon lui.

Si c’était à refaire ? « Je referais pareil », a assuré Pierre Le Guennec, ancien artisan, 80 ans, tout dévoué à « Madame », comme il appelle Jacqueline, la dernière épouse de Picasso.

Sa femme Danielle Le Guennec, 76 ans, a pour sa part entretenu « 15 ans de fidélité » avec la veuve de Picasso, qui lui « téléphonait deux fois par jour ».

Le couple a gardé le secret sur « ce magnifique cadeau » pendant près de quarante ans. « C’était peut-être un secret qu’on gardait dans notre cœur, c’était à nous », a ajouté la septuagénaire.

Une version qui n’a pas convaincu l’avocat général.

« Les époux Le Guennec avaient connaissance de l’origine délictueuse des œuvres, ils n’en parlent même pas à leurs propres enfants », a estimé le magistrat. « La thèse de l’oubli de ce trésor ne tient pas et dire que cela était gardé à titre de simple souvenir n’est absolument pas crédible ».

Cent quatre-vingts de ces œuvres, des dessins, lithographies et collages non signés ni inventoriés au moment du décès du peintre, avaient refait surface lorsque M. Le Guennec s’était présenté au fils de l’artiste, Claude Ruiz-Picasso, afin d’en faire authentifier une partie, dont un carnet de 91 esquisses, le tout datant de 1900 à 1932. Les héritiers avaient aussitôt porté plainte.

« Si j’avais été intéressé, je serais allé voir un expert ou une galerie pour les vendre », a argué M. Le Guennec, assurant ne pas savoir « ce que ça vaut ».