(Paris) L’architecte Ieoh Ming Pei est mort mercredi à l’âge de 102 ans. Originaire de Chine, il était reconnu pour son travail sur de nombreux bâtiments marquants du XXe siècle, comme la pyramide du Louvre et l'extension de la National Gallery of Art à Washington. À Montréal, il a participé à la conception de la Place Ville Marie.

Du Prix Pritzker, « Nobel de l’architecture », au Praemium Imperiale japonais, Pei a accumulé les distinctions internationales les plus prestigieuses. Pourtant ce petit homme au sourire malicieux derrière ses lunettes rondes n’a acquis une réputation mondiale qu’à partir des années 1980, après avoir beaucoup construit aux États-Unis.

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Ieoh Ming Pei

Né à Canton le 26 avril 1917, Pei arrive aux États-Unis en 1935. Il obtient d’abord un diplôme du MIT (Massachusetts Institute of Technology) avant de devenir à Harvard l’élève de Walter Gropius, fondateur du Bauhaus et l’un des théoriciens du style international.

Diplômé de l’école de design de Harvard en 1948, Pei entre dans une firme de promotion immobilière avant de créer sa propre agence en 1955, I. M. Pei and Associates.

Issu d’une vieille famille de Suzhou, « la Venise de l’Orient », près de Shanghai, I. M. Pei a reçu une éducation artistique par sa mère, flûtiste et calligraphe. Elle emmène parfois son fils en retraite dans des monastères bouddhistes, mais elle est emportée par la maladie alors qu’il n’a que treize ans. Son père est banquier à Hong Kong et dirigera plus tard la Banque de Chine à Shanghai.

Entre-temps, Pei a pris la nationalité américaine. Sa famille a été ruinée après la révolution communiste et son retour en Chine est difficilement envisageable.

L’architecte se fait bientôt connaître avec l’édification d’un complexe immobilier, le Mile High Center, à Denver, dans le Colorado (1955).  

Mais c’est Jackie Kennedy qui va doper sa notoriété en le choisissant en 1964 pour concevoir près de Boston la John Fitzgerald Kennedy Library, dédiée au président américain assassiné et inaugurée en 1979. Dès lors les commandes affluent.

Audace et polémique

En 1978, Pei réalise l’extension de la National Gallery of Art à Washington, caractérisée par un atrium triangulaire transparent. Un édifice qui marquera François Mitterrand lors d’une visite aux États-Unis avant son élection.  

En 1983, c’est à Pei que le nouveau président français demande de penser le réaménagement du musée du Louvre. C’était « le plus grand défi qu’un architecte puisse rencontrer », confiera Pei, dont c’est le premier chantier d’envergure hors de son pays et qui n’a jamais construit dans un lieu aussi chargé d’histoire.  

« Il suffit de poser les yeux sur un bâtiment pour sentir la présence du passé, l’esprit du lieu », a-t-il dit.  

Pei a l’idée de créer une entrée souterraine coiffée par une audacieuse pyramide de verre et de métal. La polémique fait rage. Un choc pour l’architecte, étonné par la violence des réactions, frisant parfois la xénophobie.  

Considéré comme l’une des principales réussites architecturales de l’époque Mitterrand, le Grand Louvre est victime de son succès (plus de 8 millions de visiteurs en 2017) et le hall de la pyramide a été repensé avec l’accord de son concepteur.

PHOTO PHILIPPE LOPEZ, ARCHIVES AFP

En 1983, c’est à l’architecte sino-américain Ieoh Ming Pei que le nouveau président français demande de penser le réaménagement du musée du Louvre. C’était « le plus grand défi qu’un architecte puisse rencontrer », confiera Pei, dont c’est le premier chantier d’envergure hors de son pays et qui n’a jamais construit dans un lieu aussi chargé d’histoire.  

Sollicité sur tous les continents, I. M. Pei n’oublie pas pour autant ses racines chinoises. « Je suis né en Chine. J’y ai reçu l’essentiel de mon éducation », dit-il.  

En 1982, il accepte, non sans avoir consulté son père, de réaliser le siège de la Bank of China à Hong Kong, haute de 315 mètres, dont la structure en triangles deviendra l’un des édifices emblématiques de la cité portuaire.  

L’architecte a laissé également sa marque à Berlin en construisant une annexe très audacieuse au musée historique allemand, inaugurée en 2003.  

Infatigable, il conçoit le musée d’art islamique à Doha (Qatar), ouvert depuis 2008 et inspiré, selon son créateur, par la mosquée Ibn Touloun du Caire.

– Avec Janie Gosselin, La Presse