Historienne de l'art, Sylvie Lacerte est réputée en tant que commissaire d'exposition et conférencière. Ses talents d'artiste, notamment de photographe, sont toutefois mis en relief à la galerie Art Plus de Sutton, qui propose, jusqu'au 25 novembre, un panorama de sa technique de photomontage développée au début des années 2000 et qu'elle vient de reprendre...

C'est grâce à l'insistance de son conjoint, l'acteur Raymond Cloutier, et à la détermination de la galeriste Brigitte Normandin que Sylvie Lacerte a été amenée à montrer que derrière la chercheuse et la commissaire, il y a une artiste à part entière. 

La directrice artistique du Symposium international d'art contemporain de Baie-Saint-Paul - pour les éditions 2018, 2019 et 2020 - pratique la photographie depuis sa tendre enfance, quand elle passait du temps avec son frère dans la chambre noire de la maison familiale.

Ce goût pour l'image ne l'a jamais quittée. Après avoir reçu une formation de peintre, de scénographe et d'historienne de l'art et des musées, elle a commencé à s'intéresser au pouvoir de la photo au début des années 2000, alors qu'elle préparait son doctorat à l'Université du Québec à Montréal. 

Peindre avec un 35 mm

Sylvie Lacerte s'est alors rendu compte qu'on pouvait «peindre» avec un appareil photo 35 mm. En utilisant des motifs photographiés provenant de sa manière très plastique de considérer son environnement. Des motifs qu'elle assemblait selon un arrangement très graphique. Inspirée par les Composite Polaroids de David Hockney, elle s'est mise à créer des photomontages qui, de loin, ont l'air d'abstractions et, de près, de collages.

«À l'époque, mes images étaient développées dans le format 4 x 6 et je faisais parfois imprimer les négatifs à l'envers pour créer un effet miroir.»

Ces effets sont visibles dans Architecture d'une pensée rationnelle, une de ses plus belles oeuvres, de 2003. 

Un jeu esthétique de reflets de l'eau dans une piscine réalisé avec deux images reproduites plusieurs fois et associées pour créer cet effet miroir.

Avec sa savante asymétrie, le photomontage Sans titre, de 2001, constitué d'images prises à Ogunquit, offre une belle harmonie dans les tons de bleu, de noir et de sable. Et un jeu d'ombres intéressant.

Parenthèse

Son doctorat prenant beaucoup de place en 2006, et comme elle préparait en même temps un ouvrage qui en découlait, La médiation de l'art contemporain, Sylvie Lacerte a mis ses photomontages entre parenthèses pendant près de 12 ans.

«J'écrivais des critiques d'art, j'étais directrice du magazine Spirale, j'enseignais et je suis devenue commissaire, conférencière, auteure, dit-elle. Après, ça m'inquiétait de montrer mon travail photographique. Je me sentais un peu imposteur! Je ne me suis jamais vraiment définie comme une photographe. Même si je n'ai jamais arrêté de faire des photos, car je trouve ça passionnant.» 

Finalement, à la suggestion de Brigitte Normandin, elle s'est remise à la tâche. Si ses premiers photomontages étaient argentiques, la photo numérique et le téléphone cellulaire ont pris le relais. Ses oeuvres sont maintenant des impressions numériques sur papier coton marouflé sur aluminium.

Photo fournie par la galerie Art Plus

Vue de l'exposition Travaux anciens/travaux récents, de Sylvie Lacerte, présentée à la galerie Art Plus (8 rue Maple, à Sutton), du jeudi au dimanche, de 13 h à 17 h.

Depuis le début de l'année, Sylvie Lacerte a puisé dans sa banque de photos pour créer de nouvelles oeuvres. Sagrada Familia est un montage de deux photos de l'église barcelonaise de Gaudí qu'elle estimait «manquées». 

Le photomontage révèle une oeuvre dynamique dans laquelle se trouvent les trois éléments auxquels la résidante de Sutton s'intéresse: la couleur, la lumière et le mouvement. 

Sans titre (Atlantide) est une de ses plus belles créations. Avec de douces images marines où les vagues, le ciel, les nuages et leurs reflets forment des couches qui se conjuguent à merveille.

Même constat avec son oeuvre qui découle d'un séjour à Venise. Après avoir vu, au Palazzo Fortuny, la toile Opera de la peintre japonaise Masatoshi Masanobu (1911-1995), Sylvie Lacerte a placé la photo du tableau en contraste avec une autre, prise l'été dernier au bord de l'océan. Dans ce mariage, les galets de la plage créent un bel écho avec la texture de la peinture.

Les oeuvres de Sylvie Lacerte ont trouvé le meilleur des écrins dans cette galerie Art Plus de Sutton créée à l'intérieur d'une ancienne église datant de 1877. Les jours de plein soleil, la lumière touffue de l'après-midi passe à travers les vitraux et vient accentuer les bleus et les ocres de ces photomontages qui en appelleront d'autres... 

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Travaux anciens/travaux récents, de Sylvie Lacerte, à la galerie Art Plus (8, rue Maple, Sutton), du jeudi au dimanche, de 13 h à 17 h, jusqu'au 25 novembre.

Photo fournie par la galerie Art Plus

Architecture d'une pensée rationnelle, 2003, Sylvie Lacerte, photomontage argentique, 108 cm x 98,5 cm