Cet hiver, le musée Pointe-à-Callière est l'écrin de 400 joyaux des cultures asiatiques. L'exposition Terre d'Asie dévoile, en primeur, une partie de la collection constituée pendant un demi-siècle par les Américains Sam et Myrna Myers. Une expo qui ravira les amateurs de porcelaines, de soieries, de sculptures bouddhiques, de bijoux en jade et autres merveilles de l'Antiquité orientale.

Aventure esthétique au coeur d'un continent fascinant, Terre d'Asie est l'histoire d'une passion. Celle d'un couple d'Américains établis à Paris tombés amoureux l'un de l'autre... mais aussi de l'art asiatique. 

Myrna Myers avait fait l'École du Louvre. Historienne de l'art, elle a créé puis dirigé pendant 40 ans une galerie d'art d'Extrême-Orient à Paris. Avocat aujourd'hui à la retraite, Sam Myers dit avoir été «mordu» par l'art. «Collectionner était devenu le fil directeur de notre vie», a-t-il déclaré lors du vernissage de l'exposition Terre d'Asie

La naissance de la collection Myers s'est produite en 1966, à Ascona, en Suisse. Le couple d'esthètes visitait une galerie d'antiquités, la Casa Serodine. Ils ont été charmés par quatre têtes de figurines de type Tanagra, du Ve ou VIe siècle av. J.-C., qu'ils ont achetées au galeriste Wladimir Rosenbaum. Ce dernier est devenu leur conseiller pour des achats ultérieurs, au début des pièces grecques, romaines et perses. 

Hommage à Myrna Myers

Au cours des ans, Sam et Myrna Myers ont pris de l'expérience et ont profité de leurs nombreux voyages pour élargir leur collection. On a déjà vu à Montréal quelques pièces de cette collection, notamment quand Pointe-à-Callière a présenté son exposition Marco Polo - Le fabuleux voyage, en 2014. Mais c'est la première fois que la collection Myers s'installe (en partie) dans un musée. Pour Sam Myers, cet événement est aussi un hommage à sa femme disparue en 2012. 

Au début du parcours de l'expo, la constitution de la collection Myers est expliquée au moyen de vidéos dans lesquelles Sam Myers, né en 1933, raconte comment a débuté cette aventure qui a amené le couple à acheter 5000 objets d'art de Chine, du Japon, de Corée, du Tibet, du Viêtnam, de l'Inde et de l'Ouzbékistan.

Jades et porcelaines

La scénographie choisie par le musée et le commissaire invité Jean-Paul Desroches entraîne le visiteur dans un voyage au coeur des cultures du continent asiatique, de 6000 ans avant notre ère jusqu'au XXe siècle. 

On découvre d'abord un grand nombre d'objets en jade, cette pierre gemme massive, de translucide à opaque, utilisée en joaillerie: des pendentifs représentant des dragons, des lames d'épée, des manches, des ornements, des statuettes, etc. Selon Jean-Paul Desroches, «il s'agit de la plus belle collection de jades en mains privées».

Comme les jades, les porcelaines sont très représentées, particulièrement les porcelaines bleu et blanc de la dynastie Yuan (1279-1368), de la dynastie Ming (1368-1644) et postérieures, notamment avec de nouvelles influences islamiques (motifs floraux et arabesques). Des jarres, des vases, des plats, des sculptures, des statuettes, des aiguières et des carafes à vin, toutes ces porcelaines sont magnifiquement conservées. Certaines pièces ont été trouvées au fond des mers lors de fouilles sous-marines. 

«La porcelaine, c'est l'invention de l'industrialisation dans le monde», a dit M. Desroches, expliquant que cet artisanat fut si innovateur aux XIIIe et XIVe siècles qu'il dépassa rapidement les frontières de la Chine. La chute de la dynastie Ming, en 1644, favorisa d'ailleurs une transformation de la porcelaine chinoise, les potiers profitant d'un relâchement des contrôles pour introduire de nouveaux dessins. 

Vêtements précieux

Quelques vêtements précieux de Chine, du Japon, du Tibet et d'Ouzbékistan sont également exposés. Des costumes du XVIe au XIXe siècle portés par des moines, des prêtres ou des lettrés. Des vestes d'apparat de samouraï, des kimonos en soie et des objets de la cérémonie du thé. 

Une section est consacrée au bouddhisme avec des têtes de bouddha en bronze et en marbre, une grande stèle votive, une tête couronnée de bodhisattva, des tissus et des sculptures en bois et en bronze. Une autre section représente un cabinet de curiosités où des objets d'art africain ont été ajoutés aux pièces est-asiatiques. Un clin d'oeil à l'engouement des Myers pour le voyage et leur récolte d'objets hétéroclites.

«Je pense que les familles et les enfants vont adorer cette exposition qui nous convie à une belle aventure, explique Francine Lelièvre, directrice générale du musée Pointe-à-Callière. Il y a beaucoup de visages et d'animaux. Ce sont des pièces accessibles en plus d'être belles.»

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Au musée Pointe-à-Callière (165, place D'Youville, Montréal), jusqu'au 19 mars.

Photo Olivier Pontbriand, La Presse

Sam Myers (ci-dessus) et sa conjointe Myrna ont assemblé pendant un demi-siècle une impressionnante collection de plus de 5000 objets d'art provenant d'Asie. L'expo Terre d'Asie présente quelque 400 d'entre eux.