L'artiste Tanya Lukin Linklater célèbre la mémoire de la première Amérindienne nommée prima ballerina, Maria Tallchief, dans sa performance présentée à la Biennale de Montréal.

Où est le génie de la danse? Chez le chorégraphe ou la danseuse? Tanya Lukin Linklater pose la question avec He was a poet and he taught us how to react and to become this poetry, une performance-installation qui sera présentée cette semaine au Musée d'art contemporain.

L'artiste de North Bay rend ainsi hommage à Maria Tallchief, la toute première Amérindienne à atteindre au statut de prima ballerina. Dans une vidéo projetée sur une surface en bois, on voit la grande danseuse en entrevue et en action à trois périodes de sa vie.

«C'est intéressant d'amener la danse dans le contexte institutionnel d'un musée. Ça complexifie notre façon de regarder et de voir les corps. Dans cette structure un peu figée, il est possible d'affirmer la grande force et l'importance de Maria Tallchief. L'histoire nous informe sur le présent. Oublier, c'est très dangereux.»

Danse contemporaine

Sur ce même faux plancher où sont projetées les images du passé, des danseuses contemporaines s'exécutent dans une chorégraphie dirigée par Tanya Lukin Linklater. 

«J'aime l'idée que le corps devienne un matériau pour l'oeuvre. La projection fonctionne très bien sur cette surface qui fait penser à la fois à une scène et à un lieu de répétition.»

Morte en 2013, Maria Tallchief a notamment travaillé avec George Balanchine. «Avec» et non pas uniquement «pour» le célèbre chorégraphe américain.

«L'intérêt est de voir comment Balanchine utilisait le potentiel du corps. Les chorégraphes sont considérés comme des génies, mais tout dépend des corps.» 

«Maria Tallchief a beaucoup utilisé ses propres capacités et ses forces. Elle était une danseuse audacieuse, athlétique. La discipline du corps peut être violente. Elle a dépassé cela, elle l'a transcendée dans sa pratique.»

Son installation joue avec la lumière des projections sur le corps des danseuses. La chorégraphie, elle, est inspirée en partie du travail de Maria Tallchief. 

«Pour moi, c'est une façon de penser au moment présent tout en se souvenant en même temps. La mémoire est un matériel de travail important pour moi. Je crois aussi que le processus est fondamental dans la création d'une oeuvre. L'apport des danseurs est important.»

Premières nations

Autochtone originaire de l'Alaska, Tanya Lukin Linklater s'intéresse donc à l'équité et à la reconnaissance des apports de chacun en création artistique, mais aussi dans l'histoire de notre continent. 

«Je réfléchis aux questions de la violence structurelle qui affecte les Premières Nations. C'est encore difficile à vivre. C'est pour ça qu'oublier est dangereux. Si on oublie l'histoire du colonialisme, on ne peut pas voir comment cela affecte la vie des gens aujourd'hui. Dans mon travail, je n'en parle pas directement, mais cela me façonne comme personne et comme artiste.»

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He was a poet and he taught us how to react and to become this poetry, au Musée d'art contemporain, jusqu'au 13 novembre.

Photo Guy L’Heureux, fournie par la Biennale de Montréal

Dans une vidéo projetée sur une surface en bois, on voit la danseuse Maria Tallchief en entrevue et en action à trois périodes de sa vie.