Le sculpteur russo-américain Ernst Neïzvestny, connu pour ses sculptures monumentales et pour une dispute célèbre avec le dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev, dont il conçut plus tard la tombe, est mort à New York à l'âge de 91 ans.

La mort de l'artiste, né en URSS et devenu américain, a été annoncée par un journaliste russe basé aux États-Unis, Oleg Soulkine, puis confirmée par les autorités russes.

«Il était à juste titre considéré comme l'un des meilleurs sculpteurs contemporains. Sa mort est une perte irréparable pour la culture», a estimé le Kremlin dans un communiqué.

Ernst Neïzvestny était connu pour ses sculptures monumentales et aussi pour s'être opposé à M. Khrouchtchev lors d'une scène restée fameuse.

En 1962, alors qu'il inaugurait une exposition d'art contemporain, le dirigeant soviétique avait qualifié les artistes présents de «dégénérés» et leur art de «merde».

Neïzvestny, décoré pour conduite héroïque pendant la Deuxième Guerre mondiale, avait répondu à Khrouchtchev «ne pas avoir peur de (ses) menaces» et avait proposé de lui expliquer son art.

Le dirigeant soviétique avait refusé et martelé que l'artiste avait gâché des matériaux qui auraient pu être utilisés dans l'industrie soviétique.

Il lui avait ensuite recommandé de quitter l'URSS, ce qui avait immédiatement provoqué l'expulsion d'Ernst Neïzvestny de la très puissante Union des artistes.

Malgré tout, le dirigeant et le sculpteur avaient ensuite noué une relation inattendue.

«Tu es une personne intéressante. Tu as le diable en toi, mais aussi un ange quelque part», avait déclaré Nikita Khrouchtchev à l'artiste qui avait rapporté ces propos dans une entrevue en 1979.

«En dépit de l'atmosphère de peur, il était facile de lui parler», avait alors souligné le sculpteur. «Khrouchtchev était très direct, ce qui me permettait de lui répondre aussi directement».

En 1971, à la mort de Khrouchtchev qui avait été écarté du pouvoir en 1964, l'artiste a été chargé par sa famille de sculpter sa stèle funéraire.

Le tombeau de l'ancien numéro un soviétique est un exemple de l'art qu'il avait autrefois vilipendé: une composition en noir et blanc, avec la tête de Khrouchtchev au milieu, pour témoigner de la dualité de cet homme qui a été le premier à dénoncer les crimes de Staline, après en avoir été un fidèle serviteur.

En 1976, alors que l'URSS est dirigée par Leonid Brejnev, le sculpteur quitte l'URSS en évoquant des «désaccords esthétiques avec le régime». Il s'installe alors en Suisse avant de partir l'année suivante aux États-Unis.