Huit nouvelles oeuvres d'Ai Weiwei traduisant l'émotion ressentie par l'artiste chinois qui a vécu quelques mois en Grèce parmi les réfugiés dont il a épousé la cause, sont exposées depuis vendredi au musée d'art cycladique d'Athènes.

«Il s'agit de la première exposition individuelle de l'artiste à Athènes et une première mondiale de présentation des ses oeuvres dans un musée archéologique», a indiqué à l'AFP Aphrodite Gonou, curatrice de ce musée connu pour sa collection d'idoles préhistoriques de la civilisation cycladique (du nom des îles de Cyclades en mer Égée).

Cette exposition programmée par le musée depuis l'été 2015 a été nourrie de l'expérience vécue par l'artiste auprès des réfugiés, qu'il a côtoyés pendant cinq mois en Grèce. Pour rendre compte des drames de l'exode, il a décidé d'installer en janvier un atelier sur l'île qui en est devenue le symbole, Lesbos, en mer Égée.

«La bouée de sauvetage» et «le pneu», deux sculptures en marbre, évoquent les périlleuses traversées en mer lors desquelles des centaines de migrants ont trouvé la mort.

Au sommet du musée, les drapeaux grec et européen flottent au côté d'un troisième portant la silhouette d'Aylan, le garçonnet kurde noyé dont la photo gisant sur une plage turque avait ému le monde entier.

L'artiste a troqué le bleu, jaune et blanc des couleurs grecques et européennes par de l'argent et du doré, pour évoquer les couvertures isothermes distribuées aux centaines de milliers de réfugiés lors de leur arrivée sur les îles grecques.

Pour dénoncer «la violence» contre les réfugiés et «la xénophobie», comme l'explique le catalogue, il confronte des canettes de gaz lacrymogène à des vases antiques, ceux de type «lacrymatoire» réputés accueillir dans l'Antiquité les larmes des proches de défunts.

Les légendes précisent que les gaz lacrymogènes datent d'une charge de la police macédonienne pour refouler le 10 avril dernier des migrants tentant de forcer leur route vers l'Europe du Nord.

Ai Weiwei rapproche aussi siècles et continents en se portraiturant en un «personnage debout», une imposante sculpture en marbre blanc, qui s'inspire directement des idoles cycladiques, mais fait aussi écho à l'une de ses oeuvres emblématiques, «le Vase de la dynastie Han». Contrairement aux statues néolithiques, les bras sont grand ouverts.

Plus loin, un «iPhone papier peint» géant, composé d'une série des photos de l'artiste sur les migrants, tapisse un des murs du musée.

L'exposition, qui comprend aussi des oeuvres phares de l'artiste depuis les années 2000, doit durer jusqu'au 10 octobre.