Sanguines, estampes et dessins consacrés à l'art antique et créés entre le XVIe et le XIXe siècle sont à l'honneur au Musée des beaux-arts de Montréal jusqu'à fin juin. Élaborée par Hilliard Todd Goldfarb, conservateur des maîtres anciens au MBAM, l'exposition Le retour à l'antique témoigne de nos liens à la fois profonds et distendus par rapport à l'Antiquité.

Le retour à l'antique: de la Renaissance au néoclassicisme, en France et en Italie. Tel est le titre de cette présentation d'une sélection de 50 oeuvres graphiques de la collection du MBAM, dont certaines sont exposées pour la première fois.

Sans avoir jamais véritablement disparu des esprits durant le Moyen-Âge, la pensée et l'art antiques ont connu un nouveau foisonnement à l'époque de la Renaissance.

«Il y a eu une exploration plus scientifique de l'art antique, de l'archéologie à la sculpture en passant par l'architecture. Et une redécouverte des grands chefs-d'oeuvre de l'Antiquité alors que Rome retrouvait son statut de centre du monde chrétien et humaniste», précise Hilliard Goldfarb, conservateur des maîtres anciens au MBAM.

Dès le XVIe siècle, les artistes français ou romains se mettent à user de références de l'Antiquité grecque pour représenter leur réalité. La France crée même en 1648 l'Académie royale de peinture et de sculpture pour enseigner aux jeunes artistes les rudiments de l'art antique.

L'exposition concoctée par Hilliard Goldfarb dans le cabinet graphique du MBAM est donc là pour illustrer ce retour à la tradition antique qui marqua le XVIe et se poursuivit jusqu'au début du XIXe siècle.

Le supplice de Régulus

Parmi les oeuvres exposées - dont un grand nombre a été acquis par le musée depuis moins de 15 ans - figurent des créations de maîtres français tels que François Boucher, Anne-Louis Girodet ou Jean-Baptiste Greuze. Nous avons fort apprécié Régulus condamné aux plus affreux supplices, créé à l'encre, mine de plomb et gouache par le dessinateur, peintre et graveur français Gabriel-Jacques de Saint-Aubin (1724-1780) en 1763. On y voit le malchanceux consul romain qui, ayant perdu la bataille de Carthage en l'an 267 av. J.-C., est condamné à mourir à l'intérieur d'un tonneau hérissé de pointes acérées.

Autre oeuvre grandiose, La bataille d'Arbelles, burin et eau-forte réalisé en 1674 par le graveur lyonnais Gérard Audran (1640-1703). Le dessin comprend une infinité de détails sur cet affrontement guerrier que remportèrent Alexandre le Grand et son armée macédonienne sur Darius, le roi des Perses, en l'an 331 av. J.-C. Une bataille qui se déroula sur un territoire aujourd'hui troublé par d'autres combats, le Kurdistan irakien.

Il ne faut pas manquer d'observer aussi le dessin au burin Apollon et Diane exécuté vers 1503 par le peintre et graveur vénitien Jacopo de' Barbari (1440/50-1516). On y voit le dieu du chant, de la musique et de la poésie armé d'un arc alors que sa soeur jumelle déesse de la chasse semble récupérer la carcasse d'un cervidé.

Le Piranèse et Rossini

Le XVIIIe siècle et le début du XIXe ayant été marqués par l'étude de la statuaire et de l'architecture antiques, une salle est consacrée aux oeuvres de deux grands artistes italiens de cette période, Giovanni Battista Piranesi dit Le Piranèse (1720-1778) et Luigi Rossini (1790-1857). Appartenant à la série Édifices et ruines de Rome et de ses environs, l'eau-forte Ruines du temple de la Concorde, gravée en 1819 par Rossini, est une pure merveille. Elle illustre toute la grandeur et la magnificence de l'architecture antique. L'artiste de Ravenne représente les vestiges d'un temple en utilisant une perspective qui rend l'église chrétienne - dessinée légèrement en arrière - minuscule par rapport au temple. Il a même ajouté près de cette église une colonne solitaire légèrement plus haute dont la présence semble ne se justifier que pour accentuer encore la prestance de l'édifice de style antique.

Cette prestance perdure-t-elle aujourd'hui? Quelle est la place de l'art antique dans notre monde contemporain? «C'est notre héritage, dit Hilliard Goldfarb. Pour notre compréhension du monde, on doit comprendre les racines de notre culture. Et c'est un héritage partagé. Les architectes utilisent encore les bases du vocabulaire et des proportions en vigueur durant l'Antiquité...»

Et des artistes contemporains s'en inspirent encore souvent, comme l'artiste montréalaise Celia Perrin Sidarous (voir onglet suivant). Exposées en ce moment à la galerie Parisian Laundry, ses dernières oeuvres découlent notamment d'un voyage récent à Pompéi et en Grèce...

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Au Musée des beaux-arts de Montréal jusqu'au 26 juin.

Les autres expos

SARAH ANNE JOHNSON

Les nouvelles photos retouchées de la Winnipegoise Sarah Anne Johnson sont exposées jusqu'au 30 janvier à la Galerie Division. Field Trip regroupe des oeuvres sur les rituels des concerts de musique en plein air et la parenthèse sociale qu'ils créent en instituant une éphémère impression d'utopie...

À la Galerie Division, 2020, rue William, Montréal, jusqu'au 30 janvier.

MICHEL GAUTIER

La TOHU accueille jusqu'au 20 février l'installation éTERREnelle!?, de l'artiste Michel Gautier. Mise en odeur par Michaël Moisseeff, l'exposition consiste en une «marche en forêt» au cours de laquelle nos sens sont éveillés. Combinant les arts imprimés, la sculpture et l'installation, éTERREnelle!? s'adresse aux petits comme aux grands.

À la TOHU, 2345, rue Jarry Est, Montréal, jusqu'au 20 février.

AQUIL VERANI

Après avoir réussi son projet de créer 24 oeuvres en 24 heures pour son 24e anniversaire à Montréal en janvier 2015, l'artiste visuel de Vancouver Aquil Verani vient de répéter l'expérience avec la création de 100 oeuvres en 7 jours à l'occasion de ses 25 ans. 

À la Galerie Mile-End, 5345, avenue du Parc, Montréal, aujourd'hui et demain, de 10 h 30 à 19 h.