Un Picasso estimé à 140 millions de dollars et une statue de Giacometti estimée à 130 millions de dollars pourraient battre lundi soir de nouveaux records mondiaux, lors d'une soirée d'enchères à New York, décrite par certains experts comme la vente du siècle.

Au total, 35 pièces dignes des meilleurs musées, créées entre 1902 et 2011, sont proposées aux enchères chez Christie's, lors d'une soirée qui pourrait rapporter 977 millions de dollars hors frais, du jamais vu selon Artprice, leader mondial de l'information sur le marché de l'Art.

Dans un secteur où les prix ne cessent de grimper, Les femmes d'Alger (version 0), toile peinte en 1955 par Pablo Picasso, espère battre le record détenu par le triptyque de Francis Bacon, Trois études de Lucian Freud, adjugé à New York pour 142,4 millions de dollars chez Christie's en 2013.

L'homme au doigt d'Alberto Giacometti, une statue en bronze longiligne d'1m77, dont il n'existe que six moulages au monde, espère battre le record actuel détenu par une autre sculpture du même artiste suisse: L'homme qui marche I, avait été adjugée 65 millions de livres (104,3 millions de dollars) en 2010 chez Sotheby's à Londres.

Selon Artprice, l'intérêt a été particulièrement important pour la statue, qui pourrait atteindre de 175 à 200 millions de dollars, et dépasser le Picasso.

L'Asie très intéressée

Parmi les oeuvres proposées lors de cette vente intitulée «Explorer l'avenir à travers le passé», figurent aussi un Monet, Parlement au soleil couchant, estimé de 35 à 45 millions de dollars, ou un Rothko de 1958, No36, Black Stripe, estimé entre 30 et 50 millions.

«Ce sera la vente du siècle», affirme Thierry Ehrmann, PDG d'Artprice. «C'est un basculement dans l'histoire de l'Art», dit-il à l'AFP.

Le record à ce jour pour une séance d'enchères date de novembre 2014, quand Christie's avait récolté 751 millions de dollars (hors frais) pour 82 lots.

L'intérêt pour ces enchères exceptionnelles était particulièrement important en Asie et dans les Emirats, a souligné M. Ehrmann, en évoquant «de nombreux clients muséaux». À ces prix, ajoute-t-il, les collectionneurs privés «ne peuvent pas rivaliser».

Les femmes d'Alger (version 0), toile colorée d'1m14 sur 1m46 qui représente une scène dans un harem, était la dernière d'une série réalisée en 1954 et 1955 par Picasso, hommage à Henri Matisse décédé en novembre 1954. le maître espagnol s'était inspiré pour cette série du peintre français du 19e siècle Eugène Delacroix.

«C'est un chef d'oeuvre à la hauteur de Guernica ou des Demoiselles d'Avignon», avait affirmé avant la vente Loïc Gouzer, vice-président de Christie's.

Selon la maison d'enchères, c'était aussi l'un des derniers grands Picasso dans une collection privée.

La statue de Giacometti est le «Saint Graal» des statues, «le moment ou Giacometti (1901-1966) est devenu Giacometti», avait aussi estimé M. Gouzer.

Les ventes d'art de printemps à New York ont commencé le le 5 mai avec l'art impressionniste et moderne chez Sotheby's, qui a fait sa deuxième meilleure soirée de son histoire dans cette catégorie, avec des ventes de 368,3 millions de dollars.

Un Van Gogh peint en 1888 durant sa période arlésienne, L'allée des Alyscamps, estimé à plus de 40 millions de dollars a notamment été acheté par un collectionneur asiatique pour 66,3 millions de dollars.

Les ventes continueront les 12, 13 et 14 mai. Sotheby's tient ses enchères d'art contemporain le 12, suivies par celles de Christie's le 13. Le 14, auront lieu les enchères d'art impressionniste et moderne chez Christie's.

Les enchères d'oeuvres d'art avaient déjà battu des records en 2014, avec un chiffre d'affaires mondial de 15,2 milliards de dollars, contre 12,5 en 2013, selon ArtPrice. Le marché offre actuellement des rendements annuels de +10% à 15% pour les oeuvres supérieures à 100 000 dollars, selon la même source.

Une santé qui s'explique notamment par l'accroissement du du nombre des collectionneurs dans le monde, mais aussi celui des musées: il va ainsi s'ouvrir en 2015 720 musées de plus de 5000 m2 au rayonnement international dans le monde, selon M. Ehrmann.