«J'ai pleuré», raconte bouleversé Joseph Mcauliffe: le musée du 11-Septembre a ouvert mercredi à New York ses portes au public, avec de premiers visiteurs émus aux larmes, revivant la tragédie qui a changé l'Amérique à jamais.

«Cela rend très triste de voir ça, devant vous», explique Joseph Mcauliffe, 64 ans, venu du New Jersey voisin. Il a pleuré en voyant un camion de pompier déformé, dans le musée construit sur le site des attentats qui ont fait près de 3000 morts en 2001.

Gina Doost, une journaliste en ligne de 26 ans a, elle, été émue par les messages d'amour écrits à la main et les affichettes sur lesquelles apparaissaient les visages de personnes disparues dont les proches cherchaient à avoir des nouvelles.

«Vous pouvez ressentir les émotions par lesquelles ces gens ont dû passer», raconte aussi Damaris Rodriguez, 61 ans, qui travaille dans les services de santé de l'État de New York.

Une de ses filles, Amy Felix, travaillait pour la banque d'investissement Lehman Brothers dans les tours jumelles. Mais ce jour-là, elle était en retard, et sortait du métro lorsque la première tour du World Trade Center s'est effondrée après avoir été percutée par un avion suicide.

Elle n'est pas venue au musée, inauguré la semaine dernière par le président Obama, encore trop traumatisée. Mais Damaris Rodriguez explique qu'elle est venue, elle, y chercher un peu de paix.

«J'ai trouvé ça impressionnant. C'était écrasant», ajoute-t-elle.

Le jour des attentats, elle avait mis cinq heures pour rentrer à pied chez elle avec sa fille, dans le Queens, voyant la fumée et les flammes au loin. «C'était absolument horrible», dit-elle.

«Comme des coups de poing à l'estomac»

Le camion de pompier abîmé, un véhicule de secours endommagé, l'ont particulièrement émue. «Ils étaient venus pour aider et étaient sans défense» raconte-t-elle. Plus de 300 pompiers sont morts le 11-Septembre dans l'effondrement des tours.

Shannon Bailey, 43 ans, un acteur qui se trouvait à New York le jour des attentats, trouve parfait le vaste musée souterrain au volume impressionnant, qui rend hommage à chacune des victimes du 11-Septembre, et retrace cette journée funeste à travers photos, objets, documents audio et vidéo souvent très émouvants.

«Cela a été très bien fait. Mais c'est comme recevoir des coups de poing à l'estomac. C'est une expérience très forte émotionnellement. J'ai eu l'impression d'aller à un enterrement».

Le musée a pourtant ses critiques.

Certaines organisations religieuses ont dénoncé une vidéo y expliquant la montée en puissance d'Al-Qaïda, estimant qu'elle était trop associée à l'islam.

Todd Fine, un historien amateur, estime qu'en blâmant les islamistes le musée expose les Américains d'origine arabe à des «conséquences problématiques». Le quartier, ajoute-t-il, a un riche patrimoine arabe, c'est là que s'étaient installés des écrivains arabo-américains au début du 20e siècle. «Il y avait même un temps sur le site une usine de cigarettes irakienne».

Mais de nombreux autres visiteurs estiment qu'Al-Qaïda n'est pas le sujet et ignorent même la salle où le musée en parle, à la fin de la visite.

«Je ne voulais même pas aller voir», explique Damaris Rodriguez. «Cela me fait du mal de penser que des gens puissent tuer au nom de Dieu. C'est dur de voir pourquoi ils nous détestent tellement».

Certaines critiques ont également visé la boutique de souvenirs du musée, des parents de victimes dénonçant cette commercialisation de gadgets sur un site où reposent 1115 victimes dont rien n'a jamais été retrouvé.

On y vend notamment des écharpes de soie avec les tours jumelles pour 95 $, un plateau à la forme des États-Unis avec trois petits coeurs signalant le lieu où les quatre avions se sont écrasés, à New York, Washington et en Pennsylvanie.

Mais le musée a besoin de fonds, faute de financement fédéral pour ses frais de fonctionnement de 60 millions $ par an. Ce qui explique aussi le prix d'entrée de 24 $, jugé trop élevé par certains, même si c'est le prix moyen des grands musées à New York.