La France s'est attaquée à l'héritage malmené de Pablo Picasso sur deux fronts, mardi, congédiant la directrice du musée fermé consacré à son oeuvre, et recommandant la protection de l'État pour le studio où il a peint Guernica.

La réouverture du musée, fermé depuis cinq ans pour rénovations, a été reportée au mois de septembre. La ministre française de la Culture a déclaré qu'Anne Baldassari, qui supervisait les travaux et dirigeait le musée depuis une décennie, avait été renvoyée en raison du besoin de «rouvrir dans les meilleures conditions, protéger les employés et restaurer la confiance entre le musée et ses partenaires».

Claude Picasso, le fils du peintre, a dénoncé au début du mois les retards dans la réouverture du musée, l'une des principales attractions artistiques de Paris. Les rénovations d'environ 78 millions $ de l'hôtel de Sale, dans le célèbre quartier du Marais, devraient permettre de doubler le nombre de visiteurs possibles, et de présenter 400 oeuvres dans 37 salles, précise le ministère.

En entrevue au Figaro plus tôt ce mois-ci, M. Picasso a confié que la ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, lui avait dit que les problèmes pour mettre des gardes de sécurité en place, tel qu'exigé selon les lois françaises, étaient responsables du retard. M. Picasso a l'impression que la France «n'a cure» de son père.

Le ministère a alors répliqué par voie de communiqué, s'en prenant aux informations «erronées» des médias à propos du retard, et demandant à «tous d'aller au-delà des intérêts personnels» et de faire preuve d'enthousiasme face à la réouverture prochaine. La beauté du musée et ses riches collections «ne souffriront pas d'une réouverture en septembre», poursuit le ministère.

Guernica

L'autre controverse tourne autour du destin d'un studio de la Rive-Gauche où Picasso a vécu et travaillé pendant 19 ans, et où il a peint sa célèbre fresque pacifiste Guernica en 1937. Un groupe voué à la préservation des lieux historiques a suggéré mardi de faire passer l'endroit sous sa responsabilité.

Il y a cependant encore loin de la coupe aux lèvres. Une société possédait déjà l'hôtel de Savoie, un hôtel particulier du 17e siècle, bien avant que Picasso n'y installe son studio, et désire désormais le rénover - et peut-être en faire un hôtel de luxe. Certains amateurs d'art bien connus sont outrés, et martèlent que le studio doit être protégé.

L'affaire a soulevé des questions quant à la possibilité de protéger les lieux de naissance de grandes oeuvres d'art - et pas seulement les oeuvres elles-mêmes -, les intégrant ainsi au patrimoine culturel des États.