Un homme d'exception, a dit Denis Coderre, un homme qui avait le respect de la terre et de la vie, Québécois et Montréalais d'adoption, «un artiste au regard neuf qui nous a amenés à mieux nous connaître nous-mêmes».

Par un discours d'une grande sobriété, le maire de Montréal a inauguré mercredi à l'hôtel de ville l'exposition-hommage à Frédéric Back, peintre, illustrateur, cinéaste d'animation, militant pour la paix et l'environnement, qui est disparu la veille de Noël à l'âge de 89 ans.

En collaboration avec la famille Back et Radio-Canada, l'exposition est présentée dans le hall d'honneur jusqu'au 27 avril; l'entrée est gratuite. Pour l'occasion, le commissaire Richard Gagnier a ressemblé une centaine de pièces illustrant le parcours exceptionnel de ce Sarrebruckois de naissance arrivé à Montréal à 24 ans, en 1948. L'année suivante, lit-on dans Français de Montréal, de notre collègue Éric Clément et Bertrand Lemeunier, il épousait Ghylaine Paquin, sa correspondante canadienne originaire d'Huberdeau. Le cahier de dessins du voyage de noces de Frédéric Back est exposé dans la vitrine centrale.

Invité au vernissage, le chef de l'opposition officielle à l'hôtel de ville a parlé après le maire. En plus court, comme il se doit, avec la bonne idée de s'inspirer des oeuvres de M. Back comme guides vers un mieux-être collectif.

Richard Bergeron a d'abord évoqué L'homme qui plantait des arbres, film d'animation narré par Philippe Noiret (sur un texte de Jean Giono); l'oeuvre a valu à M. Back son deuxième Oscar du meilleur film d'animation, en 1988. Avec Radio-Canada, il avait obtenu son premier en 1982 avec Crac!, une fable sur l'évolution rapide de la société québécoise mettant en vedette une chaise berçante. La chaise en question, ou une proche cousine, est au milieu du grand hall et on peut s'asseoir dessus.

«Comme Frédéric Back qui a lui-même planté des milliers d'arbres, nous devons reverdir Montréal en plantant 375 000 arbres avant le 375e anniversaire de Montréal en 2017», a lancé Richard Bergeron. Parfait. Comme l'idée d'évoquer Le fleuve aux grandes eaux (1993) pour illustrer la nécessité de redonner aux Montréalais «leur» fleuve. Dommage que M. Bergeron ait choisi de terminer son discours par un défi politique lancé à la face du maire: ce n'était ni le temps ni le lieu. Devant le malaise général, Denis Coderre a tourné le tout à la blague... et à son avantage devant son «collègue» Bergeron, l'homme qui se plante dans les arbres.

Pour finir, Süzel Back-Drapeau, la fille de l'artiste, a livré à l'assemblée des pensées très touchantes sur son père avec qui elle a travaillé - une relation «sauvée par l'humour» -, et qu'elle a accompagné, avec d'autres proches, jusqu'au dernier souffle. «Ceci est la première exposition de Frédéric qui se fait sans lui. Toute sa vie, il a voulu sauver la beauté du monde et, avec cette exposition dont il aurait été fier, le meilleur moyen d'honorer sa mémoire est de le suivre dans cette voie. Mais il faut faire vite!»

Ovation pour Lecavalier

Mardi, le Conseil des arts de Montréal avait fait sa part pour sauver la beauté du monde en décernant son Grand Prix à la danseuse Louise Lecavalier pour So Blue, sa première chorégraphie. Avec le chèque de 25 000$ qui vient avec, mais il y a plus...

En 25 ans dans les arts et spectacles, nous avons couvert des centaines de remises de prix, dans ce Québec qui a une forte propension à l'autocongratulation. Jamais, toutefois, n'avions-nous été témoin d'une ovation si franche, si générale et unanime, à l'annonce du lauréat d'un prix d'importance.

Louise Lecavalier était encore à bout de souffle quand La Presse lui a demandé de situer cette récompense dans la multitude de ses honneurs. Après avoir souligné la qualité des autres finalistes, la fondatrice de Fou glorieux nous a regardé droit dans les yeux et elle a dit: «C'est Montréal...»

Portez à votre agenda

Piano, piano - Le trio luxembourgeois Reis Demuth Wiltgen est au centre de la programmation du deuxième et dernier week-end du festival Jazz en rafale, qui finit demain (jazzenrafale.com). Comment dit-on «ça déménage» en Lëtzebuergesch? Ce soir à 20h à L'Astral, avec Emie R Roussel et son trio Transit en première partie. Belle affiche!

Grand jazz - Christine Jensen dirigera l'Orchestre national de jazz de Montréal dans ce concert consacré à l'Eastman School of Music et aux étudiants de la grande école de jazz de l'Université de Rochester (esm.rochester.edu). Au programme, des pièces originales écrites pour l'ONJM et des arrangements de classiques tels Con Almo de Dizzie Gillespie et Both Sides Now de Joni Mitchell. Les saxophonistes québécois François Théberge et Jean-Pierre Zanella, tous deux diplômés de l'ESM, sont les solistes invités de l'Orchestre national, jeudi prochain, 19h, à L'Astral.