Quarante-trois années de photos. Quarante-trois ans à raconter la vie, que ce soit au Québec ou ailleurs. Le musée McCord présente jusqu'au 13 avril un premier grand hommage à la photographe montréalaise Claire Beaugrand-Champagne, avec quelque 200 de ses portraits d'humanité.

À 65 ans, l'oeil avisé, Claire Beaugrand-Champagne poursuit son oeuvre de photographe documentaire. Femme de projets, elle en a encore plein la tête. Pour saisir la passion qui l'anime, l'exposition Claire Beaugrand-Champagne. Émouvante vérité. Photographies de 1970 à 2013 arrive à point nommé au musée McCord.

On peut découvrir tous les sujets qui l'ont conduite à presser le bouton de son appareil photo classique - jusqu'en 2007 - puis numérique. L'expo comprend des photos réalisées pour des quotidiens, notamment Le Jour ou La Presse dans les années 70 et 80.

Ses images illustrent le retour des mêmes dossiers dans l'actualité au Québec, comme celle qu'elle a prise des juges Cordeau, Dutil et Dionne, dubitatifs, lors d'une séance de la Commission d'enquête sur le crime organisé, en 1975. Elles nous rappellent aussi les horreurs de la guerre avec ses images rapportées de Malaisie et de Thaïlande en 1980 à l'époque des réfugiés cambodgiens, vietnamiens et laotiens.

L'exposition permet d'ailleurs de lire les articles publiés dans La Presse à l'époque avec ses photos et les textes de sa soeur, la journaliste Paule Beaugrand-Champagne.

Le visiteur appréciera ses quelques clichés de vedettes, comme cette photo très expressive de Félix Leclerc chez lui dans l'île d'Orléans ou une autre de Leonard Cohen prise en 1996 à Montréal.

L'exposition comprend aussi des séries, comme ces photos de travailleurs d'une quinzaine d'ateliers de fourrure datant de 2007, son premier travail avec un appareil photo numérique, ou encore ce reportage sur les personnes âgées qu'elle est allée croquer dans des foyers ou dans leurs maisons privées. Des photos qui traduisent la détresse, la solitude, le quotidien rembruni par les souvenirs, mais les joies aussi.

C'est chez les gens ordinaires qu'elle a trouvé son plus bel élan. Un enfant qui enterre son poussin. Un athlète blessé aux Jeux olympiques de 1976 et évacué du Stade olympique. Et ses photos de Disraeli, quand, à 24 ans, elle avait posé toute la population de ce village des Appalaches durant l'été.

Sa série Un air de famille est aussi émouvante. Elle a photographié des membres d'une même famille, notamment la sienne, toujours en présence d'une chaise. Les photos Jason, Jamie et Ari, frères ou encore Arnaud et Albert, père et fils traduisent sa propre sensibilité, son attachement aux personnes qu'elle photographie. Un attachement qu'on retrouve dans le projet qu'elle poursuit depuis une dizaine d'années, soit de prendre en photo des gens de Montréal qu'elle rencontre par hasard. Cela donne des photos touchantes de personnes de toutes origines, de toutes conditions. Des photos plus colorées qu'auparavant et qui dévoilent la richesse des humbles gens. Un arc-en-ciel de vies.

«L'exposition permet de découvrir toute la cohérence et la qualité exceptionnelle de son regard sur la société, dit Hélène Samson, commissaire de l'exposition et conservatrice des Archives photographiques Notman au musée McCord. Son regard est fait de générosité, de curiosité, d'ouverture, d'humour et d'une authenticité inébranlable, sans préjugés ni complaisance. Elle essaie de faire ressortir le meilleur de l'être humain.»

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Claire Beaugrand-Champagne. Émouvante vérité. Photographies de 1970 à 2013, du 5 décembre 2013 au 13 avril 2014 au musée McCord (690, rue Sherbrooke Ouest).