Le Carré d'art contemporain du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) accueille jusqu'au 17 mars une installation de photographies et de vidéos de l'artiste montréalais Chih-Chien Wang: des regards sur l'automne, sur l'ordinaire de la vie et sur sa propre intimité. Une invitation aussi au savoir observer.

À Montréal depuis 10 ans, Chih-Chien Wang, photographe et vidéographe d'origine taïwanaise, a été parrainé l'an dernier par le MBAM avec une résidence à la Fonderie Darling. Avec Aussi loin que nous soyons, aussi près que je peux, il expose au musée le résultat des 18 mois de cette résidence.

Il s'agit d'une vingtaine de photos et de quatre vidéos qui révèlent l'univers tout en délicatesse de Chih-Chien Wang, un artiste-poète qui a le souci de décrire avec finesse son environnement personnel et celui que nous partageons.

À l'entrée de la salle du Carré d'art contemporain, l'installation débute à gauche avec Regards fugaces, deux photographies des dos d'une enveloppe et d'une carte postale sur lesquels il a inscrit en sinogrammes des observations qu'il a formulées alors qu'il se promenait et scrutait les passants. Briquet et Chaussettes sont ainsi des poésies en prose décrivant deux personnages saisis dans leurs gestes par la curiosité de Chih-Chien Wang. Puis loin dans la salle, on retrouve Regards fugaces avec deux autres poèmes, Croisement et Fumeur.

L'observation est donc au centre de cette installation. On le note encore avec Espaces clos, six photos et une vidéo qui font contraster des situations de huis-clos avec des ouvertures sur l'extérieur. La femme de Chih-Chien Wang, Yushan, dans son atelier près des jouets de leur enfant, un portrait de Yushan encadré et enveloppé dans du papier bulle, la vue d'une chambre avec lit et panneau de bois, un cheval, la tête tournée vers l'extérieur, des cheveux photographiés sur fond blanc, l'artiste, ému, qui serre sa femme dans ses bras, près d'une porte d'entrée, les clés et le courrier dans une main, et enfin une vidéo d'un lac en automne, effleuré par le vent, vaporisé par le froid, et sur lequel flottent deux barques que l'on finit par découvrir identiques.

Chacune de ces images a ses détails et quand l'artiste nous propose, quelques mètres plus loin, ce qui semble être le même arrangement de six photos et d'une vidéo, on finit par remarquer les différences qui en font une série distincte.

Il est encore question de détails avec les deux vidéos projetées simultanément sur l'un des grands murs du Carré. Brèves rencontres no 1 et no 2 présentent, en une dizaine de minutes, des particularités de paysages montréalais, notamment du parc La Fontaine, et des portraits de promeneurs que la caméra de Chih-Chien Wang explore avec lenteur et minutie.

Les feuilles jaunies de septembre, le lac vidé de son eau à la fin de l'été, des fleurs qui refusent de faner, une feuille qui tournoie dans l'eau autour d'un axe invisible, les regards d'inconnus, une main qui tremble, une nuque ridée. Le visionnement de ces images dans le silence est reposant.

La visite se termine par Deux éléments dans une boîte, nos 1 à 9, neuf photos qui semblent montrer neuf fois les mêmes plantes dans une boîte de plastique. Pourtant, en examinant de près chaque cliché, on retrouve encore l'attention que Chih-Chien Wang consacre à la singularité des choses. En passant d'une photo à une autre, de droite à gauche, la tige en boutons a fleuri avant de finalement se faner tandis que l'autre branche, déjà morte, n'a pas changé.

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Aussi loin que nous soyons, aussi près que je peux. Chih-Chien Wang au MBAM. Jusqu'au 17 mars.