Des vitrines de Louis Vuitton au Whitney Museum, cet été, les motifs à pois de l'artiste japonaise Yayoi Kusama ont littéralement envahi New York. Des petits pois, des petits pois et encore des petits pois.

Elle a beau avoir 83 ans et vivre dans une institution psychiatrique, l'artiste japonaise Yayoi Kusama n'a rien perdu de sa verve comme en témoignent ses plus récentes oeuvres exposées au Whitney Museum de New York et sa collaboration avec Louis Vuitton.

Particulièrement renommée pour ses motifs à pois - qu'elle a peints aussi bien sur des toiles que sur des corps nus lors de happenings festifs dans les années 60 -, Yayoi Kusama n'a pourtant rien d'une artiste monomaniaque. En plus de 60 ans de carrière, elle a versé aussi bien dans la peinture, la sculpture, l'art abstrait que dans la performance.

D'abord présentée à la Tate Modern de Londres, l'imposante rétrospective que lui consacre le Whitney Museum retrace pas à pas l'ensemble de son oeuvre, de ses premiers croquis jusqu'à ses plus récents tableaux grand format datant de 2009-2010. Entre les deux, on découvre une artiste qui n'a cessé d'évoluer, de se transformer et de se réinventer.

Née au Japon en 1929, Kusama a connu une enfance plutôt difficile. Son père était coureur de jupons tandis que sa mère la maltraitait. Dès son plus jeune âge, Kusama s'est mise à avoir des visions. Elle soutient qu'elle avait des hallucinations, que les fleurs lui parlaient. Dans ses premiers tableaux, on retrouve ainsi de nombreuses fleurs aux allures plus cauchemardesques que bucoliques. Certaines s'apparentent même à des vagins dotés de dents.

Aventurière, féministe à sa manière, la jeune Kusama a défié ses parents pour aller étudier les arts à Tokyo. Et même si elle est rapidement parvenue à se faire connaître dans les cercles artistiques japonais, elle n'a pas hésité à tout plaquer en 1957 pour s'exiler aux États-Unis.

«Le Japon était trop petit, trop servile, trop féodal et trop méprisant à l'égard des femmes. Mon art avait besoin d'une liberté absolue et d'un monde plus grand», a-t-elle déjà confié.

Après avoir peint des tableaux aux thèmes et aux tons souvent sombres au Japon, Kusama se met à produire d'immenses peintures abstraites une fois aux États-Unis. Elle recouvre de grandes toiles noires de milliers de demi-cercles de peinture blanche dans sa série Infinity Net.

Rapidement, elle rallie les cercles avant-gardistes de New York. Elle organise des performances délirantes où elle recouvre ses modèles de motifs à pois. C'est l'époque du Flower Power et Kasuma est surnommée la «grande prêtresse du nudisme». Elle envoie même une lettre à Richard Nixon en lui proposant de recouvrir «son corps dur» de motifs à pois pour la paix mondiale!

À cette même époque, elle se met également à la sculpture en prenant des objets du quotidien (chaise, chaussures, vestes, etc.) qu'elle recouvre de formes phalliques (sa série sex obsession) ou de macaronis (sa série food obsession).

Considérée comme une figure de proue de l'avant-gardisme féminin, Kusama a influencé de nombreux artistes comme le Japonais Takashi Murakami, connu notamment pour sa collaboration avec Louis Vuitton. C'est donc sans grande surprise que la maison française a demandé à Kusama de produire une collection capsule.

Cette dernière est composée de toute une série de robes, de jupes, de trenchs et d'accessoires recouverts de pois (évidemment!) dans des tons extrêmement pimpants. Pour l'occasion, les boutiques de Louis Vuitton à New York se sont également parées de pois et de statuettes colorées à l'effigie de Kusama.

La rétrospective est présentée jusqu'au 30 septembre au Whitney Museum de New York.