On avait vu son orgue en papier lors du dernier Grand déploiement de la collection du Musée d'art contemporain, l'an dernier. Sculpteur, musicien, dessinateur fantaisiste et libre performeur, Adrian Norvid revient hanter la galerie Joyce Yahouda ces jours-ci avec une nouvelle exposition de ses oeuvres satiriques et ludiques.

D'abord, il propose Finkola High qui fera partie de Lignes de métro, une série de grands dessins qui seront installés sur des panneaux publicitaires de la station de métro Place-des-Arts.

L'oeuvre a été dessinée, agrandie (taille de 5 m x 2,3 m) puis peinte. BD géante, elle est très détaillée et au graphisme fignolé (l'image de marque de Norvid).

On est dans les années 70. Ambiance soirée dansante avec les étudiants straight, les fumeux de pot aux cheveux longs et les musicos style Marc Bolan de T. Rex. Une oeuvre drôle avec des personnages caricaturaux aux regards en coin, obsessifs, voire inquiétants.

«C'est une sorte de dessin collégial, dit Adrian Norvid, qui donne des cours aux étudiants de Concordia. Mais c'est aussi une fausse pub pour une fausse boisson appelée Finkola! J'aurais tellement aimé donner en même temps des verres de Finkola aux visiteurs!»

Dans l'autre salle, réservée à l'installation et à la performance, des dessins humoristiques au style victorien sont accrochés aux murs. Des objets sculptés en papier recréent un studio d'enregistrement: fausses enceintes, faux harmonium, faux synthétiseurs (avec de fausses marques), fausses bougies, faux mur d'insonorisation (dessins de boîtes d'oeufs), mais aussi de vraies affaires, comme des vieux claviers de piano sur lesquels Herr Krank (alias Adrian Norvid) improvise.

En effet, jusqu'au 17 mars, tous les jeudis, vendredis et samedis, entre 12h et 17h, Adrian Norvid accueille les visiteurs dans la galerie, parle de son travail, met sur sa tête une perruque de papier lui donnant des airs de Louis XIV puis se met aux claviers.

«J'essaie de faire partie de mes dessins, dit Adrian Norvid en enfilant une veste qu'il a lui-même dessinée. Je ne joue pas en tant que tel. Je suis et je fais ce que je veux. Tout simplement.»

Il amorce alors la mise en sons de son royaume musical où les notes ne sont pas toujours gracieuses («not so nice»), mélange de différents genres. Le thème de l'acariâtre Krank s'intitule The Thralldom of the Trill and other Musical Notsoniceties (les servitudes du trille et autres trucs musicaux pas si agréables).

L'imagination d'Adrian Norvid n'a pas de limites et son acte artistique n'est en aucun cas bridé par un souci d'esthétisme, de justesse ou de convention. Esprit libre, il laisse exprimer son habile coup de crayon, joue avec les mots et sculpte pour inventer des univers bien à lui dans lesquels on s'égare et on rit beaucoup.

On est dans le domaine de l'étrange, du comique, du surréalisme. D'où lui viennent toutes ces élucubrations? «Je dois le faire, car je ne suis pas heureux dans ce monde, dit-il. Notre monde est ennuyeux, alors je m'en suis créé un.»

Finkola High/The Cantankerous Krank, d'Adrian Norvid, à la galerie Joyce Yahouda jusqu'au 17 mars.