C'est ce qu'on appelle un petit success story. Car rien n'annonçait un tel destin pour Publicité Sauvage, qui fête cette année son quart de siècle, expos et livre à l'appui.

Il y a 25 ans, son fondateur Baudoin Wart devait se cacher de la police pour coller des affiches de spectacles. La chose était illégale et les amendes exorbitantes. Mais par amour pour l'art et la culture, cet «afficheur sauvage» prenait le risque.

«On a déjà payé jusqu'à 12 000$ de contraventions dans une année, dit-il en riant. Alors, il fallait surveiller et aller très vite. Quand je sentais que j'étais repéré, je changeais de signalement et je me fondais dans la foule.»

Un quart de siècle plus tard, Baudoin Wart n'a plus besoin de se cacher. Montréal a fini par tolérer l'affichage (voir autre texte) et Publicité Sauvage est devenue une entreprise prospère qui emploie 35 personnes et gère en moyenne 1500 campagnes publicitaires par année, en spécialisant toujours dans le domaine culturel. Dans le milieu, certains trouvent que l'entreprise en mène un peu large (voir autre texte). Mais on ne pourra pas blâmer Baudoin Wart d'avoir fait grandir sa business dans le confort.

«C'est un fou furieux, au sens sympathique du terme», résume Marc Choko, directeur de la chaire de design à l'UQAM, en parlant de M. Wart. «Il n'a jamais lâché, même s'il a eu pour des milliers de dollars d'amendes de la Ville. C'est ce qui rend son histoire si fantastique.»

Passionné par la culture de l'affichage, Marc Choko vient de diriger un très beau livre sur les 25 ans et demi(!) de Publicité Sauvage. Ouvrage important, en un sens, puisqu'en racontant l'histoire de l'entreprise, c'est aussi 25 ans de vie culturelle montréalaise qu'on résume. Il faut savoir qu'au fil du temps, Publicité Sauvage a «affiché» à peu près tout le monde dans le milieu culturel, de La La La Human Steps au Coup de coeur francophone, en passant par Louise Forestier, Fantasia, les Zapartistes, le Cirque du Soleil et les Monologues du vagin.

Engagé jusqu'au cou dans les célébrations, Marc Choko supervise également une quinzaine d'expositions d'affiches qui auront lieu pendant toute l'année. Chaque expo aura son thème et sera présentée dans un lieu adapté. Les affiches de cirque seront exposées à la TOHU (4 juillet au 4 septembre), celles de cinéma à la Cinémathèque (4 au 29 avril) de littérature à la Grande Bibliothèque (11 septembre au 9 décembre), sans oublier les affiches à caractère social ou politique, qui sont accrochées jusqu'au 4 mars à l'Écomusée du fier monde.

Oui, pas de doute, il est bien loin le temps où Baudoin Wart devait se cacher pour tapisser Montréal d'affiches. Devenue incontournable, pour le meilleur et pour le pire, l'ancienne rebelle est désormais une institution qui parle aux institutions. Elle a gagné la confiance de la Ville et s'occupe depuis 2007 du dépôt légal de ses affiches à la Bibliothèque nationale du Québec et aux Archives nationales, en plus de posséder quelque 50 000 affiches dans son propre fonds d'archives.

«Il y en a qui disent que je suis un capitaliste de l'affichage, lance Baudoin Wart avec un grain de sel. Moi, Je dis juste qu'on est devenu une belle petite entreprise québécoise, avec un créneau qui n'existait pas avant. C'est sûr que la persévérance a fait la différence. Mais ma force, c'est le service que j'offre. Je ne pose pas seulement des affiches, j'assure le suivi et un entretien régulier. Maintenant que c'est légal, on a le temps de faire ça propre.»

25 ans et demi de Publicité Sauvage

Sous la direction de Marc H. Choko, Publicité Sauvage/Éditions Infopresse