Jusqu'au 5 décembre, une vingtaine d'oeuvres sont exposées à l'Espace Création Loto-Québec pour discuter autour d'un minéral méconnu, le verre.

«Pour réécrire l'histoire, il fallait briser le kaléidoscope», écrit Walter Benjamin. Si l'intellectuel allemand figure dans les écrits de l'exposition Kaléidoscope à l'espace Création Loto-Québec, c'est grâce au commissaire invité, Paul Bourassa.

«Je le lisais quand ce projet est né. L'idée de départ a pris son envol grâce à lui», raconte le conservateur du Musée national des beaux-arts du Québec. Avec le directeur artistique Louis Pelletier, aussi conservateur de la Collection Loto-Québec, ils se sont partagé le travail: l'un a pensé le fond, l'autre la forme. Tous deux amoureux de cette substance minérale, ils ont profité de Montréal Ville de verre pour en proposer quelques variations autour de cinq thèmes: la nature, l'aura, la narration, l'objet, l'histoire.

«Je voulais apporter des angles de lecture sans pour autant désingulariser l'oeuvre de l'artiste», explique cet expert de la céramique et du design qu'est Paul Bourassa.

Bien que la fabrication du verre reste toujours surprenante, ici, la technique s'efface pour laisser place à l'art. «Le temps passé sur une oeuvre importe peu, ce qui compte, c'est l'apport de l'artiste», souligne à juste titre Louis Pelletier.

À travers l'oeuvre d'une vingtaine d'artistes, les deux conservateurs se sont appliqués pour donner à ce moyen d'expression un aspect à la fois surprenant et protéiforme. Verre soufflé, à la flamme, fusionné, il y en a de toutes les sortes et pour tous les goûts.

Certains artistes dialoguent sur l'origine du verre - le sable - pour inventer des «feuilles fossilisées», «une faune marine baroque» ou jouent comme Tanya Lyons sur deux matières pour susciter «l'étrange et le grotesque». L'artiste enferme dans une bulle de verre des graines d'asclépiades, de pissenlits et de clématites sauvages, puis les assemblent en forme de robe. D'autres jouent avec la lumière, le mouvement (les séries de Maude Bussières), les ombres (Susan Edgerley) et défient la transparence du verre. Un peu plus loin, Catherine Labonté retombe en enfance et enferme un ours dans une cloche en verre.

«Le globe isole, examine, capte», explique le commissaire. Karina Guévin, Donald Robertson, Bruno Andrus, Patrick Primeau questionnent la nature de l'objet: utile ou artistique? La première enroule des colliers autour de vases en verre tandis que le second, le Vortex III, nous plonge dans une infernale spirale. Il en a fallu du temps pour l'éclairer, précise Louis Pelletier, le verre transmet la lumière mais il faut l'aborder d'une certaine façon pour qu'il la projette. La meilleure façon de le regarder pour Donald Robertson est de le mettre au bord de la fenêtre!

L'inclassable Vanessa Yanow n'oublie pas d'interroger le passé avec son oeuvre composée d'une broderie inachevée des années 70. «Elle s'approprie le modèle d'un artefact et reconstitue une scène», souligne Paul Bourassa.

Sachant que l'histoire du verre est contemporaine à l'image des expositions sur le sujet, il ne faut pas manquer cette occasion rare de découvrir un nouveau langage artistique.

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Kaléidoscope, variations sur le verre québécois, du 29 septembre au 5 décembre à l'Espace Création Loto-Québec.