Présentée à la galerie Pierre-François Ouellette Art contemporain, la troisième expo solo de Dil Hildebrand, jeune prince du trompe-l'oeil postmoderne, est une pure merveille qui va ravir ses admirateurs.

Peepshow. Le titre de l'exposition de Dil Hildebrand est provocateur et fondé. On entre, on regarde sans toucher et la grâce n'est pas la même selon la perspective. «Mon travail induit une attitude qui s'apparente à une contemplation discrète et secrète, comme dans un lieu de séduction», affirme Dil Hildebrand.

Avec Peepshow, le Montréalais originaire de Winnipeg et tout jeune papa nous invite dans le décor de son atelier. L'explication un peu brute est qu'il a pris des photos de son studio du quartier Centre-Sud, qu'il a reproduit ensuite sur la toile en donnant à l'ensemble une impression de flottement entre peinture et photographie, un mariage entre surface et espace.

«Le studio est aussi un alter ego de la galerie, explique Dil Hildebrand. Il y a comme une relation de symbiose, un aspect de miroir. Les couleurs des toiles sont comme une fenêtre par laquelle on devine le studio. Elles donnent la profondeur et permettent l'accès, invitent à l'accès.»

Plus qu'une juxtaposition éclairée de couleurs sur des prises de vue, Peepshow est une expérience visuelle d'envergure. Les oeuvres sont splendides: la photo originale s'est fondue avec les couleurs. On ne se lasse pas d'aller et venir devant les toiles lumineuses, de les contempler sous tous les angles, de toutes les distances. Leur mystérieuse plénitude devient vite familière et invitante. Hildebrand est un paysagiste des temps modernes. Les impressions qu'il parvient à faire surgir sont époustouflantes.

Tel un artisan

On comprend mieux le résultat quand on sait qu'il a déjà été créateur de décors. Comme il l'a démontré lors de ses deux expositions précédentes dans la même galerie, il n'a pas son pareil pour forger un monde à partir d'un alliage de réalisme, de cubisme et de fantastique. Hildebrand est un artisan: cent fois sur le métier il remet son ouvrage. Il sue, il peine, il déchire et recommence. Son processus de création est complexe. Avant de parvenir au résultat final qu'il agrée, combien de toiles ne frôleront jamais les murs du Belgo...

Quand ça marche, il passe de deux semaines à un mois sur une même toile. «Techniquement, c'est difficile, dit-il. Il faut parvenir à créer un équilibre entre l'abstraction et l'image. Je veux qu'on puisse voir l'espace, mais il ne faut pas qu'il domine la peinture. J'essaie d'atteindre ce repos qui laisse aller l'imagination quand on regarde la toile.»

La galerie de Pierre-François Ouellette se prête à merveille à cette exposition. Les grands tableaux président avec panache l'espace aux murs immaculés. Les plus petits, des avant-goûts de leurs grands frères de même qu'une série au fusain sont installés dans une pièce sombre et bien éclairée mettant en évidence le travail de l'artiste.

Plus intimes et plus sombres, les dessins au fusain reproduisent l'atelier de l'artiste avec un touché bien rendu. «Il travaille avec une gomme à effacer après avoir noirci le papier, dit Pierre-François Ouellette. Très étonnant. Je ne connais personne qui travaille ainsi.»

Âgé de 36 ans, Dil Hildebrand fait son chemin sur la voie d'une peinture contemporaine renouvelée où un certain romantisme se marie au temps présent. Il a remporté en 2006 le Prix du concours de peintures canadiennes RBC. Le mois prochain, il participera à la 4e Biennale internationale d'art de Pékin. Jusqu'au 3 octobre, il fait partie de l'exposition L'anti-sublime, à la Maison de la culture du Plateau-Mont-Royal. L'an prochain, il exposera à la YYZ Artists' Outlet, à Toronto. Avant même le vernissage, jeudi, bien des oeuvres étaient déjà accompagnées de petits points rouges.

L'exposition, dont l'entrée est bien sûr gratuite, est couplée à la vente d'un catalogue, Long Drop: les peintures de Dil Hildebrand, publié chez Anteism.

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Peepshow de Dil Hildebrand jusqu'au 16 octobre à la galerie Pierre-François Ouellette Art Contemporain.