Pionnière dans le domaine des arts intégrés à l'environnement, Micheline Beauchemin est morte hier à Québec des suites d'un accident vasculaire cérébral.

Construite en 1963, l'église Saint-Jean Vianney de Rosemont se réchauffe d'une somptueuse tapisserie aux tons d'automne. Le mur-écran de verre du foyer de la salle Maisonneuve de la Place des Arts (1967) se pare de milliers de prismes d'acrylique laissant passer la lumière. Au Palais des Congrès, de gigantesques Ailes nordiques (1984) brillent de toutes leurs lamelles aux couleurs vives ou métalliques.

Après un voyage en Grèce, en 1954, Micheline Beauchemin fréquente l'atelier du sculpteur Zadkine, à Paris, puis expérimente le vitrail à Chartres. «À ma deuxième exposition au Musée des beaux-arts de Montréal, tout a été vendu, confiait-elle. Avec l'argent, je suis parti à Kyoto faire des recherches sur les rideaux de scène.» Après ce premier séjour, elle réalise une première commande importante: la tapisserie du foyer de la salle Wilfrid-Pelletier à la Place des Arts.

Micheline Beauchemin s'installe aux Grondines en 1965, dans une vieille maison québécoise, avant de repartir au Japon. Elle y rencontre l'architecte Kenzo Tange, le sculpteur et designer Noguchi, John Cage, Yoko Ono. «J'ai réalisé là-bas le rideau de scène du Centre national des arts à Ottawa (1968) avec des fils de métal, de plomb, d'or, d'argent, de filaments d'acrylique découverts sur place, mais qui reflétaient nos hivers.»

La richesse et la fécondité de ses oeuvres se sont réalisées tout autant au Japon qu'à l'occasion de ses nombreux voyages. C'est pourtant aux Grondines qu'elle avait choisi de s'enraciner pour s'y inspirer du spectacle du fleuve avec ses glaces l'hiver.

À la suite de ses premières tapisseries, plus traditionnelles, ses formes se font plus complexes avec des réseaux ou des pans architecturant l'espace. Dernière-née d'une centaine de commandes, Soleil, a été inaugurée en 2008 à la Tohu.

Cette pièce aux allures de feux d'artifice incorpore des matériaux bien éloignés de la tapisserie traditionnelle: fibre optique, aluminium, verre, serpentins de plastique, miroirs, filets. Une rétrospective intitulée Micheline Beauchemin. Fleuve de lumière est toujours présentée au Musée national des beaux-arts de Québec jusqu'au 11 octobre.

Micheline Beauchemin avait reçu à l'automne 2005 le prix Borduas du Québec. En 2006, le Conseil des Arts du Canada, lui a décerné un des prix du Gouverneur général en arts visuels.