L'exposition Picasso et les maîtres, qui s'ouvre mercredi à Paris, constitue le plus gros budget d'assurance jamais atteint en France pour ce genre d'événement, regroupant pendant quatre mois 210 oeuvres venues du monde entier évaluées à des centaines de millions d'euros.

Le coût de la prime d'assurance, 790 000 euros, constitue à lui seul près d'un cinquième du budget de l'exposition (4,5 millions d'euros). Ce prix a déjà été réduit de moitié grâce à la garantie de l'État pour les dommages excédant 100 millions d'euros.

Picasso, bien sûr, mais aussi El Greco, Delacroix, Cézanne, Goya, Rembrandt, Manet, Velazquez, Ingres, Degas, Van Gogh: l'ampleur exceptionnelle de l'événement explique ce record.

La valeur des tableaux assurés «représente des milliards d'euros», confie ainsi Marion Mangon, chef du département des expositions à la Réunion des Musées Nationaux (RMN), qui se refuse à donner un chiffre plus précis.

L'oeuvre la plus chère coûte presque 100 millions d'euros. Et l'ensemble des oeuvres pourraient valoir au total 2 milliards d'euros, estime-t-on dans le secteur de l'assurance.

«C'est colossal», lâche Stéphane Oury, responsable risques spéciaux chez Hiscox. Le groupe britannique, membre du Lloyd's de Londres, assure l'exposition Jeff Koons à Versailles, dont les oeuvres sont évaluées à environ 300 millions d'euros, «ce qui est déjà un très gros budget», indique M. Oury.

Pour l'exposition Picasso, c'est le français Axa Art qui a été choisi, le seul à avoir les capacités suffisantes pour couvrir ce type d'événement, en dehors du Lloyd's. Le groupe français, présent dans 9 pays, assure déjà 1500 à 2000 expositions chaque année en France.

Les toiles appartenant aux musées nationaux (environ un tiers des oeuvres) ne sont pas assurées par Axa, l'État étant alors son propre assureur.

Seules sont couvertes les oeuvres venues de musées étrangers, de musées français non nationaux, ou de collections privées.

«C'est alors une garantie de clou à clou», explique Marc Rome d'Axa Art.

Les tableaux sont couverts du moment où ils sont décrochés de leur lieu habituel de conservation, jusqu'à leur retour. L'assurance est tous risques: incendie, explosion, dégâts des eaux, vol et même terrorisme ou guerre.

L'évaluation du prix de l'oeuvre, indispensable au calcul de la prime d'assurance, est réalisée par le prêteur. Afin de faciliter la tenue de l'exposition, le Prado a par exemple fixé pour La Maja desnuda de Goya, qui n'était encore jamais sortie du musée madrilène, une «valeur très haute mais pas folle», explique Mme Mangon. Car, ajoute-t-elle, «cette oeuvre n'a pas de valeur en soi. Ils auraient pu lui fixer un prix trois fois plus élevé, cela ne nous aurait pas étonné».