L’autobiographie de Ginette Reno – simplement intitulée Ginette – aurait été vendue à plus de 50 000 exemplaires en moins d’un mois, selon le producteur et homme d’affaires Nicolas Lemieux, responsable de la mise en marché du livre dans les pharmacies Jean Coutu et sur son site Oziko.

L’autobiographie de la diva québécoise, signée par l’auteur-compositeur-interprète Lambert, a été lancée le 6 avril dernier en contournant la chaîne du livre, soulevant l’ire de l’Association des libraires du Québec et de nombreux éditeurs.

Ginette Reno a en effet publié son livre à compte d’auteur. C’est elle qui a assumé les coûts d’écriture, d’édition, d’impression et de mise en marché. Ginette n’était offert dans à peu près aucune librairie. Les quelques libraires qui ont fait l’acquisition du livre l’ont fait aux conditions du producteur, notamment en percevant une part de 15 % au lieu des 40 % habituels.

Au bout du compte, selon Nicolas Lemieux, en éliminant les intermédiaires, la part de profit de l’artiste avoisinerait les 50 % – plutôt que les 10 % habituellement remis aux auteurs. Et les ventes se poursuivent.

Le producteur, qui a aussi lancé l’album C’est tout moi de Ginette Reno – déjà disque d’or avec ses 40 000 exemplaires vendus –, parle d’une « opération grandiose ».

On parle de 50 000 copies en moins d’un mois, c’est exceptionnel, et je vous confirme qu’on est retourné en réimpression pour la deuxième fois. Je ne le regrette pas, et si c’était à refaire, je le referais de la même manière.

Nicolas Lemieux

Nicolas Lemieux a également vanté son partenariat avec Jean Coutu, responsable de la vente du livre dans les 460 pharmacies de la chaîne – au Québec, au Nouveau-Brunswick et en Ontario – jusqu’au 31 décembre prochain.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Le producteur Nicolas Lemieux

Y a-t-il des discussions avec Ginette Reno pour publier des suites ? Nicolas Lemieux n’a pas trop voulu s’avancer. « Oui, il y a des discussions, mais avec Ginette c’est une chose à la fois. Il y en aura d’autres. Que ce soit avec Ginette ou avec d’autres vedettes d’ailleurs, suivant ce même modèle d’affaires, a-t-il insisté. Je ne passerai jamais par la chaîne du livre. »

Le producteur derrière le projet musical Harmonium symphonique admet que cette opération a été facilitée par le statut de supervedette de Mme Reno. Il ne s’engagerait d’ailleurs pas dans un projet semblable avec un auteur inconnu. « C’est sûr que je travaille avec des vedettes sur des projets à grand déploiement. »

Depuis le début de cette aventure, Nicolas Lemieux estime que son modèle d’affaires fonctionne, notamment parce qu’il n’y a pas de retours. « Il n’y a pas de pertes, pas de livres pilonnés. Je le répète, je ne l’ai pas fait contre les libraires ou contre les bibliothèques, mais pour Ginette. Je maintiens que dans le modèle actuel de la chaîne du livre, le partage n’est pas équitable. Il y a quelque chose qui ne marche pas. »

Ginette n’est pas dans les bibliothèques

Comme La Presse l’a déjà écrit il y a quelques semaines, les bibliothèques publiques du Québec ne peuvent pas légalement faire l’acquisition du livre, la Loi sur le développement des entreprises québécoises dans le domaine du livre les forçant à acheter leurs livres « dans au moins trois librairies agréées » de leur région administrative. Comme le livre est presque introuvable en librairie…

« Il existe bien une procédure d’exemption à la loi, nous a dit la directrice générale de l’Association des bibliothèques publiques du Québec, Ève Lagacé, mais après avoir reçu un avis du ministère de la Culture et des Communications, cette avenue a été exclue, a-t-elle confirmé. La seule manière de retrouver ce livre en bibliothèque est si un usager ou un citoyen en fait don. Mais on parle d’un nombre anecdotique. »

En dépit de cette politique, Nicolas Lemieux nous assure que certaines bibliothèques ont fait l’acquisition du livre directement sur son site web.

Sur le fond, il y a eu bien sûr des critiques, certaines assez acerbes, sur la qualité du récit et de l’écriture de l’autobiographie de Ginette, qui sautait du coq à l’âne. Des critiques qui auraient sans doute été évitées si un éditeur et un véritable auteur avaient été mis à contribution. Qu’en pense Nicolas Lemieux ?

« Tous les goûts sont dans la nature, nous répond-il. Ce livre est écrit d’une façon différente, mais ça ressemble à Ginette. Peut-être qu’un jour elle va demander à un auteur ou à un journaliste d’écrire un livre, mais celui-là, elle l’a fait comme ça. Tout le monde a le droit de formuler des critiques, il n’y a rien de parfait, mais ça a été fait avec cœur, ça a été fait de bonne foi et la réception du public a été très positive, donc on est très satisfaits de ce lancement. »