Le problème, c’est la désobéissance ou l’obéissance ? Anaïs Barbeau-Lavalette croit qu’il est temps de se poser la question. D’où cette liste d’œuvres qui expliquent ce qu’est la désobéissance civile et montrent comment elle peut changer le monde.

Essai
Désobéir, de Frédéric Gros

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Cet essai de Frédéric Gros définit la désobéissance civile et traverse la pensée de plusieurs auteurs qui y ont réfléchi au fil des siècles comme l’humaniste et poète Étienne de La Boétie et la philosophe Hannah Arendt. « Je pense que c’est nécessaire à lire en ce moment », dit la cinéaste, en précisant que cet essai est « facile à lire » et « super inspirant ». Elle souligne un extrait : « Ce livre voudrait comprendre […] pourquoi il est si facile de se mettre d’accord sur la désespérance de l’ordre actuel du monde, et si difficile pourtant de lui désobéir. » Elle invite aussi à lire Henry David Thoreau, « qui fait le pont entre la désobéissance civile et l’amour de la nature ».

Documentaire
I Am Greta

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L’incroyable odyssée de la jeune Greta Thunberg est racontée dans ce documentaire de Nathan Grossman qui commence au moment où la jeune fille amorce sa grève scolaire pour le climat. Anaïs Barbeau-Lavalette raconte que le film déconstruit notamment l’idée que l’adolescente a été instrumentalisée par ses parents et montre combien elle est à la fois droite, savante, fébrile et fragile. « Elle espérait rallier les troupes, mais ne s’attendait pas à ce mouvement-là, observe la cinéaste. Je trouve que ça fait du bien à voir en ce moment parce qu’on dirait qu’on était sur un élan d’éveil et que tout a été arrêté à cause de la pandémie. » Elle croit que le bouillonnement va reprendre dès que ce sera possible. « Cette vague-là n’est pas éteinte. »

Cinéma
Woman at War

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Anaïs Barbeau-Lavalette a vu ce film du réalisateur islandais Benedikt Erlingsson à Cannes en 2018. Il raconte l’histoire d’une femme dans la cinquantaine qui mène un combat contre Rio Tinto, multinationale de l’aluminium qui cherche à étendre ses activités en Islande. Son militantisme est bousculé par l’aboutissement d’une demande d’adoption déposée longtemps auparavant et qui en fera une maman. « J’aimerais ça éventuellement faire un film qui s’inscrit dans ce grand discours [environnemental], qui soit inspirant et pas épeurant, dit Anaïs Barbeau-Lavalette. Je n’ai pas envie d’un film catastrophe. » Woman at War est, de son point de vue, une « fable écologique moderne pas moralisante et pas cucul ». Offert dans l’iTunesStore. Elle s’en voudrait de ne pas mentionner aussi l’adaptation contemporaine d’Antigone de Sophie Deraspe, sortie l’an dernier.

Littérature jeunesse
Rosa Parks

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Ce livre pour enfants de Lisbeth Kaiser et Marta Antelo, publié ici à La courte échelle, raconte l’histoire de Rosa Parks, surnommée la « mère » du mouvement des droits civiques aux États-Unis. Son action révolutionnaire ? Elle a refusé de céder son siège à un passager blanc dans un autobus de Detroit, au Michigan, en 1955. Son geste et la campagne menée par la suite par un certain Martin Luther King mèneront à l’abolition de la ségrégation raciale aux États-Unis. La cinéaste juge que ce livre donne un bon exemple d’un refus non violent qui a changé l’histoire. « Elle avait raison moralement, alors que tout dans le contexte la condamnait », relève-t-elle.

Musique
Le déserteur

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Chanson emblématique du répertoire de Boris Vian, Le déserteur n’était pas au départ l’hymne pacifiste qu’on connaît. La chute originelle était : « Prévenez vos gendarmes, que je tiendrai une arme et que je sais tirer. » Vian l’a changée, à la demande de Marcel Mouloudji, qui l’a interprétée en premier. Avec sa nouvelle finale — « Prévenez vos gendarmes que je n’aurai pas d’arme et qu’ils pourront tirer » —, la chanson est devenue un symbole et une incarnation poétique de la désobéissance civile. Anaïs Barbeau-Lavalette, dont le grand-père paternel a été déserteur, aime ce « récit bouleversant » qui célèbre « ceux qui cassent les règles ».

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Boris Vian

Littérature
Morgentaler, l’obstiné

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Le DHenry Morgentaler a fait de la prison pour avoir pratiqué des avortements — alors illégaux au Canada — et une de ses cliniques a même fait l’objet d’un attentat à la bombe. Anaïs Barbeau-Lavalette l’a croisé, alors qu’elle avait 20 ans, sur un plateau de télévision où il était question d’engagement. « J’ai lu sur son histoire [par la suite] et ça m’a montré le pouvoir de la désobéissance, dit-elle. Cet homme a été emprisonné pour avoir sauvé la vie de plusieurs femmes. » La cinéaste croit que la trajectoire du médecin pose clairement une question fondamentale : doit-on continuer à obéir à des règles injustes ?