(Québec) La contribution au milieu culturel du gouvernement Legault peut se résumer à trois mots : « le vide abyssal », selon la députée libérale Isabelle Melançon.

Fragile, le milieu culturel québécois a un besoin pressant du soutien de l’État, ce que la ministre de la Culture, Nathalie Roy, ne semble pas comprendre ou être en mesure de fournir, selon la porte-parole libérale en culture.

Dans une charge à fond de train, la députée a lancé un véritable cri du cœur, ne cachant pas son inquiétude quant au sort réservé à divers dossiers culturels d’actualité, tout au long d’une entrevue accordée à La Presse canadienne, durant le week-end.

La députée libérale reproche essentiellement deux choses à la ministre de la Culture. Premièrement, l’absence de réalisations à son actif après sept mois de pouvoir, sans compter l’apparente inanité de projets sur sa planche à dessin.

Sur une note plus personnelle, elle déplore l’attitude « agressive » de la ministre à son endroit, chaque fois qu’elle se lève en Chambre pour lui poser une question.

Le « vide abyssal »

Mais ce qui l’inquiète le plus, c’est la feuille blanche, qui semble selon elle tenir lieu de plan de match au ministère de la Culture depuis la nomination de Mme Roy.

« C’est vide. C’est d’un vide abyssal son discours actuellement, en matière de culture », estime Mme Melançon, qui connaît bien le milieu, ayant été cadre à la Société des entreprises culturelles (SODEC) et directrice du cabinet de la ministre Hélène David, alors à la Culture.

« Clairement, je crois qu’elle n’a pas encore enfilé les habits d’une ministre », juge la députée de Verdun.

Excédée, elle dit en avoir assez « du ton inapproprié » de Mme Roy à son égard et de son « mauvais théâtre » en Chambre, quand elle « hurle » et n’arrête pas « de lancer de la bouette » à tout moment à l’opposition libérale pour sa gestion passée.

Le pire, c’est qu’elle « n’a jamais répondu à aucune question » qui lui a été posée, selon elle.

PHOTO IVANOH DEMERS, ARCHIVES LA PRESSE

La députée libérale Isabelle Melançon reproche essentiellement deux choses à la ministre de la Culture. Premièrement, l’absence de réalisations à son actif après sept mois de pouvoir, sans compter l’apparente inanité de projets sur sa planche à dessin.

Sur le fond, elle trouve pitoyable et inquiétante la situation actuelle, se disant « triste » pour les artisans de la culture, un milieu qui demeure « toujours fragile », et en attente d’actions.

« Le silence de la ministre est inquiétant », car on ignore toujours quelles sont ses orientations, déplore la députée, qui dit chercher depuis des mois à l’amener à se commettre, en vain, dans divers dossiers.

Statut de l’artiste

Par exemple, elle dit avoir tenté à maintes reprises, sans succès, de savoir si et quand la ministre allait donner suite à l’annonce d’une nouvelle politique culturelle faite en juin par l’ex-ministre libérale Marie Montpetit. Le milieu réclamait depuis des années une mise à niveau du statut professionnel des artistes, à l’ère du numérique, et de leurs conditions de vie, tout en souhaitant un soutien accru de l’État afin de percevoir les revenus auxquels ils ont droit.

La ministre Montpetit avait promis alors de déposer deux projets de loi. On ne sait toujours pas quel sort leur sera réservé avec le gouvernement actuel.

Ces projets législatifs s’inscrivaient dans une vaste politique culturelle, que le gouvernement actuel devra aussi évaluer.

Le 1 % ?

La ministre Roy a par ailleurs « tenté de tromper les gens », en affirmant que le budget de son ministère atteignait désormais 1,3 % du budget de l’État, ce qui est faux selon l’ancienne ministre de l’Environnement.

Au contraire, le budget de la culture a subi « un vrai recul », assure Mme Melançon. La ministre a réussi à afficher son « 1,3 % », selon elle, en changeant la méthode de calcul pour grossir les chiffres, en incluant notamment les crédits d’impôt offerts aux producteurs culturels, ce qui ne se faisait pas avant.

Plateformes numériques : « vide sidéral »

Lors de l’étude des crédits budgétaires en culture, la semaine dernière, la députée de Verdun a reproché aussi à la ministre de ne pas avoir déposé de mémoire au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), au moment où il procède à une révision des lois sur la radiodiffusion et la télédiffusion.

« Personne n’a fait entendre la voix du Québec », a-t-elle déploré. Ce à quoi la ministre avait répliqué qu’elle avait des discussions avec le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez.

Elle a aussi proposé sans succès la création d’un fonds dédié à la culture, qui serait constitué des sommes obtenues grâce à Netflix, qui perçoit désormais la TVQ.

Selon elle, la ministre Roy n’a pas su non plus mettre en place des mesures pour soutenir financièrement la production québécoise sur les plateformes numériques, la grande tendance de l’heure.

Encore là, c’est « le vide sidéral ».

Toutes les demandes d’entrevue à la ministre sont restées sans réponse.