Salomé Corbo anime ce soir la deuxième édition du spectacle-bénéfice Vive ton courage. Peu importe le sujet, la comédienne, qui fait partie du collectif Les Courageuses, ne craint pas d’exprimer ses opinions, même si celles-ci peuvent déplaire à certains. Entrevue.

Le Grand Montréal comique apporte encore une fois son soutien aux victimes d’agressions sexuelles en présentant le spectacle que vous allez coanimer avec François Massicotte. Avez-vous hésité avant d’accepter ce rôle ?

Oui, parce que dans la société actuelle, bien des gens disent que les personnalités s’achètent du capital de sympathie en s’associant à une cause. En même temps, nous sommes tous bénévoles.

Vous pourriez ne pas avoir envie d’être associée à cette cause, afin qu’on ne vous accole pas l’étiquette de « victime ».

Ce n’est tellement pas dans ma nature, d’être victime, que si une personne me pose une étiquette de victime, c’est dans son regard à elle. 

Avez-vous aussi l’impression que plus les gens vont dénoncer leurs agresseurs, moins il y aura d’agressions ?

Je ne suis pas pour que les tribunaux populaires prennent le relais. Mais oui, je crois que si les prédateurs savent qu’ils n’ont plus l’impunité et que ça peut leur péter dans la face, ça peut restreindre leurs comportements. Peut-être qu’ils vont maintenant se questionner sur ce qui est considéré comme correct. Peut-être qu’ils vont comprendre qu’accoter cette fille-là dans un coin ou insister au party de bureau, ils ne devraient plus faire ça. Et peut-être qu’ils auront une meilleure vie sexuelle, d’ailleurs. Ils vont réapprendre à charmer et à faire la danse du paon.

À quoi ressemblera votre animation ?

Je n’ai aucun numéro de préparé. Ma ligne de travail pour ce projet est de ne pas me préparer. C’est mon métier dans la vie d’être improvisatrice [elle est joueuse dans la Ligue nationale d’improvisation depuis 20 ans], mais ça n’empêche pas que j’ai le trac de faire ça. Mais ce saut dans le vide, cette prise de risque, est une façon d’être solidaire avec les victimes, parce que nous ne sommes jamais prêts dans la vie à vivre un évènement comme ça. Mon courage à moi donc, lors de cet évènement, est d’arriver sans aucune préparation.

Vous ne craignez pas d’exprimer vos opinions, notamment sur Twitter. Bien des artistes ne le font pas, de peur de perdre des contrats ou de se mettre à dos une partie de leur public. Pourquoi le faites-vous ?

Le phénomène du réseau social m’intéresse. Un troll qui m’envoie des insultes par la tête, j’adore réussir à terminer ça par : « Merci pour cet échange finalement cordial. » C’est comme si je m’étais donné comme mission niaiseuse d’essayer de créer le dialogue même avec des gens qui ne pensent pas comme moi. Je pense qu’un artiste, pour être pertinent, doit comprendre le monde dans lequel il évolue.

Mais vous pouvez recevoir des commentaires d’une grande violence. Ça ne vous déplaît pas ?

Oui, ça peut être très violent… Une femme m’a dit que j’étais devenue folle depuis que j’avais failli exploser à Bruxelles [la comédienne était à l’aéroport de Zaventem lors de l’attentat qui y a fait 32 morts, outre les kamikazes, et 340 blessés le 22 mars 2016]. C’est excessivement dangereux de dire ça à quelqu’un ! Elle fouille dans mon traumatisme. Je fais ça plus pour faire avancer la notion de débat que pour faire avancer mon programme politique. Ce qui m’anime, ce n’est pas la volonté de convaincre les gens. C’est la volonté d’échanger sur des opinions divergentes. Je trouve ça bien intéressant lorsqu’on arrive à se comprendre. Pas se convaincre, mais se comprendre.

Vive ton courage est présenté samedi soir, à 20 h, à l’Olympia. Les profits seront remis au Regroupement québécois des centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, à la Fondation Marie-Vincent et à l’organisme La Traversée.

Consultez la page du spectacle