Le jury du procès de Bill Cosby a de nouveau suspendu ses délibérations mardi soir, après 15 heures de huis clos sur deux jours, et reprendra ses travaux mercredi matin.

Réuni entre 10h00 et 21h00 environ mardi, le jury n'est pas encore parvenu à se déterminer sur le sort du fameux comédien de 79 ans, jugé depuis le 5 juin.

Accusé d'avoir abusé d'Andrea Constand, en 2004, à son domicile de la banlieue nord de Philadelphie, Bill Cosby affirme que la relation était consensuelle.

Elles sont plus de soixante femmes, au total, à lui imputer une agression sexuelle ou un viol, sur une période couvrant plusieurs décennies. Le dossier Constand est le seul pour lequel les faits n'étaient pas prescrits pénalement.

Lesté de ces accusations, Bill Cosby a déjà perdu, il y a plusieurs années, son aura de père idéal de l'Amérique.

Avec le Cosby Show (1984-1992), série télévisée à grand succès qui mettait en scène, pour la première fois aux États-Unis, des personnages afro-américains et aisés, Bill Cosby était devenu célèbre dans le monde entier.

Cosby, un «homme malade»? 

Chantre de l'éducation et de la responsabilisation, en particulier au sein de la communauté noire dont il était le héros, il incarnait une forme de rectitude morale, image qui s'est envolée en fumée.

Le verdict désormais attendu mercredi concluera un procès lors duquel plusieurs témoins ont dépeint un homme à l'image séduisante mais au caractère manipulateur, jouant de sa notoriété pour s'en prendre à des femmes.

«Tout le monde vous connaît, M. Cosby», lui avait dit l'un des policiers lors d'une audition en 2005. «Pas vraiment», avait-il répondu.

Lors d'une conversation avec la mère de la victime, il se serait lui-même qualifié d'«homme malade», souffrant vraisemblablement d'une pathologie sexuelle, même s'il ne l'a pas formulé ainsi.

En ouverture du procès, une autre victime présumée, Kelly Johnson, avait décrit son agression, intervenue en 1996, et montré que se dessinait, au fil des témoignages, un même mode opératoire.

Bill Cosby faisait prendre à ses cibles de puissants sédatifs afin de disposer d'elles, plus tard, sans craindre de résistance.

Le comédien a refusé de témoigner durant son procès et ses avocats n'ont cité qu'un seul témoin, interrogé durant une poignée de minutes seulement.

La défense a multiplié les tentatives pour pointer les incohérences et les revirements d'Andrea Constand dans ses auditions successives par les policiers, en 2005.

Mais la Canadienne de 44 ans, qui s'exprimait publiquement pour la première fois depuis l'inculpation de Bill Cosby, a fait forte impression lors de son témoignage.

Son calme et son acuité ont empêché les avocats de l'accusé de la destabiliser.

Jusqu'à 30 ans de prison 

Malgré tout, la défense a défendu bec et ongles la théorie d'une liaison supposée entre Andrea Constand et Bill Cosby, que l'ancienne basketteuse aurait cherché à cacher pour présenter le comédien comme agresseur.

Lors de sa plaidoirie, lundi, l'avocat de l'humoriste, Brian McMonagle, a accusé Mme Constand d'avoir menti aux policiers.

«Elle ne veut pas dire la vérité sur ce qui s'est passé», a-t-il lancé aux jurés, de sa voix haut perchée.

«Dire qu'il s'agit d'une relation qui a évolué à plusieurs niveaux n'a aucun sens», lui a opposé lundi Kevin Steele, le procureur du comté de Montgomery, où se sont déroulés les faits présumés.

S'il est reconnu coupable des trois chefs d'accusations retenus contre lui (pénétration sans consentement, en état d'inconscience de la victime et après avoir administré des médicaments), Bill Cosby risque, en théorie, jusqu'à 30 ans de prison.

Même condamné, Bill Cosby pourrait tout de même échapper à la prison, car la loi de Pennsylvanie ne fixe pas de peine minimum, a rappelé la porte-parole du procureur du comté de Montgomery.

Une fois le verdict rendu par le jury, il appartiendra au juge de fixer la peine, vraisemblablement dans un délai de deux à trois mois.

REUTERS

Andrea Constand en cour, mardi.