La mort de l'infirmière britannique Jacintha Saldanha, qui s'est suicidée après avoir été piégée par deux animateurs de radio australiens, démontre que les blagues au téléphone requièrent un minimum d'éthique, selon Pierre Brassard et les Justiciers masqués.

Réputé pour avoir piégé la reine Élisabeth en 1995, Pierre Brassard a dit au New York Times, lundi, qu'il était content de ne plus faire ce genre de blagues. «Si j'en faisais encore, j'arrêterais certainement d'en faire», dit-il.

Hier après-midi, il a précisé à La Presse qu'une grosse blague au téléphone n'est peut-être pas bienvenue en ce moment. «Pour ce genre de piège, les Bleu Poudre avaient un code d'éthique», a-t-il dit, avant d'ajouter que, lorsqu'il faisait de telles blagues, il ne s'en prenait qu'à des personnalités publiques, jamais à des «gens ordinaires».

Les Justiciers masqués, qui ont dupé 60 personnalités publiques du monde entier au téléphone depuis 12 ans, ont toujours eu cette approche.

«Nous, on ne considère pas qu'on fait la même chose que les deux animateurs australiens, dit Sébastien Trudel. L'un des deux est un ancien de la téléréalité. Ils ne sont pas humoristes ni des gens dont c'est le métier de faire ce genre de coup d'éclat. De plus, ce qu'ils ont fait est illégal. On ne peut pas demander à une infirmière de trahir le secret médical.»

Sébastien Trudel dit que ce qui a été enregistré par les animateurs australiens, qui se sont fait passer pour la reine d'Angleterre et le prince Philip, n'aurait pas été diffusé au Québec. Ni lui ni les producteurs ne l'auraient accepté. «On passe toujours par des agents ou des intermédiaires professionnels et on ne cherche pas à avoir des informations privées, dit-il. On n'a pas l'impression que les animateurs australiens ont fait ça pour faire un gag, mais pour avoir des informations. Ça fait penser à des paparazzis de la radio.»

Cette affaire n'empêchera pas les Justiciers masqués de continuer (dès janvier) à faire des blagues au téléphone. «On n'a jamais eu aucun problème ni aucune demande de non-diffusion, dit Sébastien Trudel. On sait ce qu'on fait. S'attaquer à quelqu'un d'inconnu du grand public et qui voit son nom partout dans les journaux, ce n'est pas comme parler à Bill Gates, qui a l'habitude de la pression médiatique. Nous, il n'y a jamais eu de conséquences pour qui ce soit. Au contraire. Beaucoup de personnes piégées ont publié des communiqués après la blague pour dire que c'était drôle. La comparaison avec ces animateurs n'est pas correcte. Nous, on se rend toujours à la personne qu'on vise et on lui demande si cela ne la dérange pas que ce soit diffusé. Ça a toujours été oui.»

Quand les Justiciers masqués ont piégé le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, cette année, ils ont passé par un certain nombre d'intermédiaires au téléphone. Ces personnes ont quand même pu être très affectées après s'être fait avoir par les deux comiques québécois? «Oui, mais leur travail, c'est la sécurité, répond Sébastien Trudel. Si elles ne sont pas capables de le faire, cela révèle une faille dans le système et c'est une nouvelle. Mais on s'éloigne du débat. Si un artiste sur scène reçoit une mauvaise critique et se suicide, est-ce qu'on va arrêter d'écrire des critiques?»