Le Mois de l'histoire des Noirs a 20 ans. Âge idéal pour prendre son envol et entrer de plain-pied dans l'âge adulte. Après 19 présentations plus ou moins marginales, l'événement met cette année les bouchées doubles pour sortir de son ghetto.

Jusqu'au 28 février, près de 90 activités (films, spectacles, conférences, expositions) seront présentées dans la grande région de Montréal. Trois fois plus ambitieuse que l'an dernier, cette programmation bénéficie en outre d'une campagne promo sans précédent, visant les journaux gratuits, les abribus et les colonnes publicitaires. Le tout sera parrainé par l'acteur Danny Blanco Hall (Sortie 67, Les hauts et les bas de Sophie Paquin) et la rappeuse Jenny Salgado du groupe Muzion.

«Je pense qu'on a amené le tout à un niveau plus mainstream, explique Carla Beauvais, coordonnatrice de l'événement. Le Mois de l'histoire des Noirs a longtemps été fermé sur lui-même. Vingt ans plus tard, il y a encore des gens qui ne savent pas que ça existe. Il était temps qu'on décloisonne pour que tout le monde soit au courant.»

Cette nouvelle visibilité permettra non seulement de sensibiliser le grand public à la réalité noire d'ici et d'ailleurs, mais aussi les jeunes Noirs en quête d'identité.

«Notre objectif est de faire avancer les discussions autour de la question noire, mais aussi d'aider notre jeunesse à se réapproprier son histoire et ses valeurs, avance le président du Mois de l'histoire des Noirs, Michael Farkas. Si ce n'est qu'un clin d'oeil, ce sera déjà ça.»

Bons coups

Parmi les bons coups, on soulignera la visite de l'auteur à succès canadien Lawrence Hill (The Book of Negroes) qui viendra présenter son nouveau livre Aminata (23 février, Maison de l'Afrique; 24 février, librairie Olivieri), le concours de beauté Miss Afrique Canada (5 février, salle Marie-Gérin-Lajoie de l'UQAM), un festival de films et documentaires gais et lesbiens afro-caribéens (Massimadi, du 9 au 12 février, ONF), la première présentation du Festival de films sur l'esclavage (28 février, Salle des boiseries, pavillon Judih-Jasmin, UQAM), une messe congolaise en hommage aux premiers Noirs du Québec et aux indépendances africaines (dimanche 6 février, église Notre-Dame-des-Anges), une expo de photos sur les Haïtiens de Montréal (du 3 au 27 février, Maison de la culture Rivière-des-Prairies), une conférence sur les Noirs «oubliés» de l'histoire canadienne (23 février, Maison de l'Afrique) ainsi que la pièce de théâtre Joe Louis: An American Romance (jusqu'au 20 février, Bain Mathieu), dont le collègue Daniel Lemay a fait état hier dans ces pages.

Une absence à souligner: le gala des prix SOBA (Sounds of Blackness Awards), consacré aux talents noirs de Montréal, ne sera pas de la fête cette année. Rappelons qu'en 2010, l'événement avait suscité la controverse en honorant des artistes, disons... plus pâles, tels que Lynda Thalie et Florence K. «Nous n'avons pas reçu leur candidature. Avec toutes les critiques qu'ils ont subies, ils étaient à même de se questionner sur la pertinence de tenir leur événement en février», lance diplomatiquement Carla Beauvais.

Selon ce qu'on sait, les SOBA se tiendront cette année en avril. Un changement de date n'aurait toutefois rien à voir avec la controverse de l'an passé. «C'est une décision stratégique que nous expliquerons en temps et lieu», a affirmé hier le porte-parole du gala, Marc McKenna, en évoquant une conférence de presse imminente.

In extremis

Courtepointe d'initiatives indépendantes, le Mois de l'histoire des Noirs est chapeauté depuis 2009 par un nouveau conseil d'administration, ce qui explique en partie son dynamisme retrouvé. À cause d'un imbroglio légal (l'organisation avait été dissoute unilatéralement par d'anciens membres), cette 20e mouture a toutefois bien failli ne pas avoir lieu. L'affaire ne s'est réglée devant la Cour suprême qu'à la fin novembre, deux mois avant l'événement.

Demandées in extremis, les subventions s'avèrent par ailleurs plus généreuses que l'an dernier. Le MICC a haussé son aide financière à 24 000 $, après l'avoir réduite de 34 000 $ à 10 000 $ en 2010. La Ville contribue pour sa part avec 30 000 $, le reste du budget relevant de sommes discrétionnaires et de commandites privées. D'autres commanditaires pourraient se rajouter avant la fin du mois et les organisateurs parlent déjà de préparer la 21e présentation.

«Les choses avancent, conclut Michael Farkas. On commence à prendre notre place comme n'importe quelle autre manifestation culturelle du Québec.»

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Pour horaires, adresses et informations supplémentaires: moishistoiredesnoirs.com