Dès la toute première scène, j'ai su que j'allais être conquis par Les beaux gosses. Deux ados boutonneux - comme on peut l'être outrageusement à 13 ou 14 ans - observent un «mocheton» en train d'embrasser goulûment une fille. Envie et jalousie.

En fait, le couple impromptu fait plus que se «rouler une pelle» (comme disent nos cousins). Les deux tourtereaux se pourlèchent à un point où l'exercice - très technique - relève plutôt de la laryngoscopie...

C'est à la fois très juste et très drôle. D'autant plus que les observateurs, qui en bavent, sont de petits connards encore peu avantagés par la nature, partageant la même obsession que tous les gars de leur âge: le passage à l'acte.

D'une certaine façon, Riad Sattouf, qui signe ici un premier long métrage après avoir été révélé par la bande dessinée, réinvente le film d'ados. L'exploit n'est pas mince.

Qu'ils soient conçus pour un public très ciblé, ou qu'ils explorent simplement la réalité de personnages ayant atteint le fameux âge ingrat, les films du genre répondent habituellement à des critères très précis.

Les comédies populaires américaines, façon American Pie, empruntent souvent les allures de contes très moraux, même si le langage vert et les situations grivoises font écran. À l'autre bout du spectre, des portraits hyperréalistes d'une jeunesse complètement désoeuvrée, ou alors, des drames prenants à la Kids, Tout est parfait, et autres À l'ouest de Pluton. Entre les deux, des productions parfaitement aseptisées - À vos marques... party! - où l'on propose une vision emballée sous vide avec du papier rose bonbon, méticuleusement enrubannée par des adultes.

Il y a du Larry Clark chez Riad Sattouf. Et aussi du Judd Apatow. Son film atteint la juste note dans sa représentation existentielle, mais le trait - serait-ce la trace du dessinateur - est aussi accentué. Et rappelle avec humour les vicissitudes d'un âge où le cocktail hormonal est rien de moins qu'explosif.

Une période en porte-à-faux où les gars, particulièrement, se préparent pour le fameux jour où, enfin, se pointera vraiment l'occasion d'un rapport épidermique de nature sexuelle. En attendant, on «frenche» le miroir pour s'exercer; on enfourne le doigt dans la gueule du pote pour lui montrer que, non, la salive ne coulera pas pendant la délicate opération du baiser; on «peaufine sa technique»; on se branle aux cinq minutes dans de vieilles chaussettes en reluquant dans un vieux catalogue les pages consacrées à la lingerie féminine. Quand le mannequin de l'époque se révèle être la mère d'une copine, la machine à fantasmes, alors, enclenche «grave»...

Au-delà de ces «délicieuses» observations, et de l'approche ludique qu'emprunte son réalisateur pour les décrire, Les beaux gosses fait quand même écho à une réalité commune à toutes les générations. Et évoque - douloureusement par moments - les tourments d'une étape de la vie marquée par des vexations multiples, des rapports parfois cruels, et, surtout, par la quête obstinée et obsédante d'un premier contact charnel.

On ne s'étonnera pas de retrouver ici les préoccupations d'un cinéaste ayant déjà publié des bandes dessinées aux titres évocateurs: Retour au collège, La vie secrète des jeunes, Circoncision... Son fameux Manuel du puceau avait d'ailleurs fait couler beaucoup d'encre au moment de sa publication.

D'abord présenté à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes, où la rumeur a commencé à s'emballer, les gosses de Sattouf ont provoqué un petit phénomène en France, le film attirant davantage, il est vrai, un public plus adulte. Il n'est pas dit que l'écho sera le même chez nous.

Cela dit, Riad Sattouf propose un vrai regard. Que nous saisirons au vol en qualité d'ex-boutonneux. Et, toujours, de beau gosse...

Daho en spectacle

Permettez-moi ici une petite incartade - je n'en ai pas l'habitude - du côté de la «variété française». Peut-être avez-vous lu ou entendu un petit peu partout les commentaires élogieux - et justifiés - soulignant la sortie du nouvel album d'Étienne Daho, tiré d'un spectacle offert l'an dernier à la salle Pleyel. Je joins évidemment ma voix au concert d'éloges (la pop très raffinée de Daho m'enchante depuis 20 ans), mais je déplore quand même une chose. Le DVD tiré de ce spectacle - encore plus magnifique que le disque - n'est malheureusement pas disponible au Québec. Le sera-t-il un jour? J'en doute.

L'auteur du Premier jour du reste de ta vie, chanson à l'origine du film ayant valu un César à Marc-André Grondin, n'a pas été vu en spectacle dans nos parages depuis plus de 15 ans. Et ses chansons tournent très peu. Mais sait-on jamais. Le DVD du spectacle de Fabrice Luchini, Le point sur Robert, est finalement disponible chez nous depuis mardi, soit près d'un an après sa sortie dans l'Hexagone. Gardons espoir.

En passant, quelqu'un aurait-il retrouvé la trace du diptyque Mesrine, dont on attend toujours la sortie?