Malgré la controverse et le tollé de l'an dernier au sujet des compressions de 45 millions de dollars dans les programmes à vocation culturelle, le gouvernement Harper en remet avec l'examen stratégique de budgets d'organismes culturels.

Lundi, Radio-Canada évoquait de nouvelles compressions de 56 millions qui pourraient la toucher en 2010-2011, mais d'autres organismes culturels fédéraux sont également touchés par ces «réallocations» de budgets de 5 %. Selon les informations recueillies par La Presse, au moins une douzaine de millions pourraient être retranchés du budget de ces organismes.

«Tous les organismes recevant des fonds du gouvernement doivent se soumettre à l'examen stratégique une fois aux quatre ans. Ils doivent examiner 100 % des dépenses de programme et des coûts d'opération et identifier les 5% qui performent le moins bien ou sont moins prioritaires. Ils doivent recommander la réallocation de ces fonds à des programmes qui fonctionnent mieux», explique le porte-parole du Secrétariat du Conseil du Trésor, Pierre-Alain Bujold.

Le hic, c'est que le gouvernement reçoit ces recommandations et en fait ce qu'il veut en vue de la préparation du prochain budget. Il peut accepter les recommandations, décider de réallouer les sommes déterminées à d'autres ministères ou organismes ou les supprimer tout simplement.

C'est ce qui est survenu l'an dernier dans le cas du retrait d'enveloppes, comme PromArt et Routes commerciales, destinées aux tournées d'artistes à l'étranger. Ces programmes ont été jugés «inefficaces» par le ministre du Patrimoine canadien, James Moore et n'ont jamais été remplacés.

Conseil des arts et ONF

Cette année, pour la préparation du budget 2010-2011, c'est au tour de l'ONF et du Conseil des arts du Canada de procéder à cet examen stratégique. Le vice-président du Conseil, Simon Brault, confirme que la commande de 5 % touche à l'organisme subventionneur, mais il refuse de commenter un processus qui n'est pas encore entamé. Il pourrait s'agir de compressions de 9 millions.

«Comme membre du conseil d'administration, soutient-il, ma première responsabilité est de faire valoir le principe de l'indépendance réelle du Conseil des arts par rapport au gouvernement. Le gouvernement a évidemment le droit de nous accorder plus ou moins d'argent, mais ça n'est pas à lui à nous dicter comment le dépenser, ce que garantit la loi qui a créé le Conseil en 1957.»

M. Brault ajoute que l'organisme rend déjà des comptes au parlement canadien par le biais du ministère du Patrimoine canadien.

«L'exercice de revue stratégique sera fait avec le plus grand sérieux, dit-il, mais nous rappellerons certainement au gouvernement une évidence, à savoir que chaque sou que nous dépensons présentement est essentiel à l'avancement des arts, surtout au moment où l'économie bat de l'aile.»

Dans un rapport publié mardi, la vérificatrice générale, Sheila Fraser, a d'ailleurs déclaré qu'elle n'avait trouvé «aucune lacune importante» dans la gestion des subventions par le Conseil des arts. Elle juge même que ses pratiques ont «contribué à son succès dans plusieurs domaines» puisque le traitement des demandes de subvention est «juste, uniforme et objectif».

L'Office national du film devra également se soumettre à l'examen stratégique cette année en vue du prochain budget fédéral. C'est une somme de 3,3 millions qui devra être grugée çà et là dans l'organisation dont les crédits n'ont pas été revus à la hausse depuis de nombreuses années.

De son côté, le Musée des beaux-arts du Canada a goûté à cette médecine l'an dernier. L'examen du MBAC s'est soldé par des compressions de 2,5 millions de dollars. Résultat: mises à pied et exposition annulée à Shawinigan, entre autres.

«Nous n'avons pas été chanceux, commente la directrice des communications de l'institution, Joanne Charette. Cet exercice se fait tous les quatre ans et nous espérons que ce ne sera pas avant.»

Avec la collaboration de Nathaëlle Morissette