Malgré le manque d'unanimité dans le milieu artistique, la ministre de la Culture, Christine St-Pierre, maintient qu'il faut abolir la taxe de vente du Québec (TVQ) sur les produits culturels québécois afin de stimuler la consommation.

Mme St-Pierre a affirmé mardi que des regroupements ont récemment fait des représentations pour que les 50 millions $ perçus sur les produits culturels servent plutôt à soutenir la production culturelle.

En sortant d'une commission parlementaire où les crédits de son ministère étaient examinés, Mme St-Pierre a cependant maintenu que ce sont les consommateurs qui doivent profiter de cette promesse électorale des libéraux.

«Moi j'ai toujours dit, et le premier ministre aussi, son objectif est d'encourager le consommateur, a-t-elle déclaré. Mais j'ai toujours dit que ma porte ne serait jamais fermée aux groupes qui ont des représentations à nous faire.»

En novembre dernier, en pleine campagne électorale, le premier ministre Jean Charest avait promis que la taxe québécoise de 7,5 pour cent ne s'appliquerait plus sur les CD, DVD, billets de spectacles, de cinéma ou de musée, ainsi qu'aux oeuvres d'art, en autant qu'il s'agisse de produits d'artistes québécois.

Mme St-Pierre a reconnu mardi qu'il pouvait être plus difficile d'établir l'origine québécoise de certains produits culturels, comme des CD ou des DVD, et que des analyses sont en cours présentement.

«Le disque, le DVD, ça peut être plus compliqué, a-t-elle dit. Pour le théâtre, ce n'est absolument pas compliqué.»

La ministre a répété que la mise en oeuvre de ce congé de TVQ était toujours à l'ordre du jour du gouvernement, qui souhaite compléter l'opération d'ici la fin de son mandat.

Le Mouvement des arts et des lettres (MAL), qui représente plusieurs organismes du secteur culturel, a suggéré au gouvernement de créer plutôt un fonds constitué des sommes perçues grâce à la TVQ sur les produits culturels.

Bastien Gilbert, porte-parole du MAL, a affirmé que ce financement pourrait servir au Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ), dont le mandat est de soutenir la production culturelle québécoise.

«S'il y a un coût pour l'État, on aimerait autant, si l'État accepte de payer quelque chose, qu'il soutienne mieux le Conseil des arts et des lettres pour qu'il dispose d'un meilleur financement», a-t-il dit.

Selon M. Gilbert, il peut s'avérer difficile de déterminer ce qu'est un produit culturel québécois.

«Qu'est-ce qu'un produit culturel, a-t-il demandé. Y a-t-il une définition de ça? (Cette promesse) n'est pas simple à appliquer.»

Le président de l'Union des artistes, Raymond Legault, croit que l'exemption de TVQ sur les livres a déjà démontré que ce type de mesure n'avait pas d'effet tangible.

«Cette mesure n'a pas fait ses preuves dans le cas du livre, a-t-il dit. Il ne s'est pas vendu plus de livres québécois depuis ce temps-là.»

Selon M. Legault, l'abolition de la TVQ serait fort probablement absorbée par les différents producteurs et distributeurs, notamment ceux qui offrent à la fois des produits culturels québécois et étrangers, comme les cinémas.

«Les propriétaires de cinéma ne veulent pas créer deux systèmes d'administration avec des billets qui appliquent la TVQ et d'autres qui ne l'appliquent pas», a-t-il dit.

Selon M. Legault, la création d'un fonds constitué de revenus de la TVQ serait complexe mais le gouvernement pourrait utiliser ces sommes pour bonifier directement le budget d'institutions comme le CALQ et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec.

«Si le gouvernement était prêt à renoncer à des revenus de 50 millions $, il serait peut-être préférable qu'il conserve ces revenus là et qu'il investisse davantage en arts et en culture», a-t-il dit.

Le porte-parole de l'opposition officielle en matière de culture, Maka Kotto, craint pour sa part que le congé de TVQ soit contesté par les États-Unis en vertu des règles de l'Organisation mondiale du commerce.

«Ce serait une mesure discriminatoire, peut-être même interprétée comme une mesure de protectionnisme», a-t-il dit.