Le ministre du Patrimoine canadien, James Moore, s'est dit «très content» du quatrième budget de son collègue des Finances, Jim Flaherty, hier. Déçus, les milieux culturels avaient plutôt la mine basse devant le manque de soutien direct aux artistes et à l'exportation de la culture.

Le ministre Moore estime, au contraire, que le budget répond adéquatement aux milieux culturels qui l'accusaient de supprimer l'aide à l'exportation des talents canadiens jusqu'ici.

 

«Vous savez qu'on a eu un grand débat sur l'aide à nos artistes à l'international, dit-il. Maintenant, on va créer le plus important prix pour les arts et la culture au monde. Cela va aider à la perception sur la scène internationale que le Canada est un vrai leader dans ce domaine.»

L'idée vient du festival Luminato de Toronto. Un fonds de 25 millions sera créé dont les dividendes serviront à un nouveau prix d'excellence qui sera ouvert aux artistes canadiens et étrangers. Les détails ne seront toutefois pas connus avant plusieurs semaines.

Le gouvernement conservateur s'est également félicité dans le budget d'avoir prévu «plus de 335 millions sur deux ans dans des programmes liés aux arts et à la culture», soit 267 millions d'argents frais, a précisé le ministre Moore qui rappelle que le budget du Conseil des arts, même s'il n'est pas augmenté, atteint désormais 180 millions par année.

Par ailleurs, le Fonds canadien de télévision est renouvelé pour les deux prochaines années avec une enveloppe totale de 200 millions pour «produire et diffuser des émissions de télévision nettement canadiennes et de grande qualité».

Le gouvernement souhaite aussi venir en aide aux éditeurs de magazines et de journaux communautaires, en leur réservant une enveloppe de 30 millions sur deux ans.

Le budget inclut aussi des mesures connues. Tel que rapporté par La Presse dimanche, 60 millions seront ajoutés sur deux ans au programme Espaces culturels Canada, pour investir dans des infrastructures culturelles. Le Fonds des nouveaux médias, qui sert à appuyer les initiatives canadiennes dans ce domaine, aura droit à 14,3 millions par an.

Puis, les festivals canadiens de tout acabit pourront jouir d'un financement accru, qui passe à 100 millions sur deux ans. Ces sommes serviront à «appuyer des manifestations culturelles populaires telles que des festivals de jazz ou d'autres genres musicaux qui attirent un grand nombre de touristes», explique-t-on.

Le gouvernement a enfin confirmé qu'il investirait dans la formation de haut niveau dans le secteur des arts: les établissements de haut calibre comme les écoles nationales de ballet ou du cirque pourront jouir d'un financement additionnel de 20 millions sur deux ans.

Déceptions

Du côté de Culture Montréal, la directrice Anne-Marie Jean qualifie le budget de «décevant» devant les attentes des milieux culturels pour un soutien accru à la création et à l'exportation.

«L'argent en formation est une bonne nouvelle, dit-elle toutefois, et on espère que les milliards de Chantier Canada pourront servir aux équipements culturels parce que 60 millions en deux ans pour Espaces culturels, c'est trop peu. Montréal devrait avoir droit à lui seul à une bonne part de ce montant.»

Reste que la fronde des milieux culturels à l'automne n'a pas été comprise, pense Stanley Péan, porte-parole du Mouvement pour les arts et les lettres et président de l'UNEQ.

«Il y a des choses intéressantes, mais c'est décevant de ne rien voir pour les créateurs et la diffusion. C'était pourtant le message de la communauté artistique. Ce n'est pas surprenant puisqu'en visite à Montréal récemment, M. Moore n'avait pas voulu rencontrer les associations d'artistes.»

Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, ajoute enfin que le refus des conservateurs d'éliminer les coupes en culture, un secteur très important pour l'économie québécoise, va continuer à faire souffrir toutes les régions du Québec, selon lui.