Les deux parties d'un tableau de Nicolas Poussin, Vénus et Adonis-Paysage au dieu-fleuve, peint vers 1626 et découpé à la fin du XVIIIe siècle, sont exceptionnellement réunies et exposées dans un même cadre pour la première fois en France depuis deux siècles.

«Les deux tableaux ont parfois été présentés dans des expositions internationales, mais dans deux cadres différents», explique Michel Hilaire, le directeur du Musée Fabre de Montpellier.

«C'est la première fois depuis deux siècles, d'abord à New York au printemps», dans le cadre d'une exposition consacrée au peintre français, «et cet été à Montpellier, que les deux toiles sont réunies dans un même cadre», poursuit-il.

Le tableau, présenté avec une barrette de bois séparant les deux parties, a été découpé au XVIIIe siècle pour des raisons commerciales. «Poussin était déjà un peintre très recherché, particulièrement en Italie, et représentait déjà une valeur marchande», souligne Michel Hilaire. «Le tableau est large, un marchand en a fait deux».

Dans sa partie droite, propriété du Musée Fabre, Vénus enlace son amant Adonis, en pleine nature, sous un arbre, le couple étant entouré de petits amours. Vénus, qui craint pour la vie du jeune homme, passionné de chasse, tente de le dissuader de s'attaquer aux bêtes féroces.

À gauche, le dieu fleuve est allongé par terre, avec à ses côtés le chien d'Adonis. Témoin des amours de Vénus et d'Adonis, il exprime dans le soleil couchant un sentiment de mélancolie. «Poussin essaye de rendre l'instantané de l'amour menacé par la mort d'Adonis», qui interviendra au cours d'une chasse au sanglier, raconte Michel Hilaire.

La partie Paysage au dieu-fleuve est entrée dans la collection d'une Américaine, Patti Birch, une galeriste de New York, en 1961. Vénus et Adonis a été acheté par François-Xavier Fabre au XIXe siècle. Aucun des propriétaires ne savait que ces deux toiles constituaient une seule et même oeuvre, ce qu'un historien d'art anglais a fini par établir à la fin des années 1970.

À Montpellier, on se plaît à rêver «de faire rentrer la partie manquante dans les collections» du Musée Fabre, en rachetant Paysage au dieu-fleuve. Sans savoir si cette partie sera un jour en vente. «Je ne connais pas, indique Michel Hilaire, les intentions réelles du Patti Birch Trust», qui gère l'héritage de Patti Birch.