Le jeune réalisateur israélien Guy Nattiv était de passage à Montréal pendant le Festival du film israélien pour présenter Mabul, portrait attendrissant d'une famille à reconstruire. Mais c'est dans le tourbillon de New York qu'on a attrapé Nattiv, quelque part dans les rues bruyantes de la Grosse Pomme où il courait d'un film à une rencontre pendant le Tribeca Film Festival.

Mabul - «inondation» en français - a aussi une tout autre signification phonique, non sans un certain rapport avec le propos de son film, fait-on remarquer au cinéaste.

«J'ignorais que ça pouvait vouloir dire cinglé ou fou en français. En langue arabe, ça signifie la même chose», dit-il. Le personnage pivot de Mabul est un jeune autiste prénommé Tomer. Dans cette histoire, ce sont ses parents qui méritent d'être traités de fous. À commencer par son père Gidi, pilote de petits avions, un type plutôt paumé qui a perdu son permis après s'être fait pincer à fumer du pot pendant ses heures de service.

Sa femme Miri (brillante Ronit Elkabetz) sent qu'elle va bientôt craquer, entre son boulot à la garderie, sa vie de couple qui s'effrite et le retour à la maison forcé de Tomer qui quitte l'institut qui l'a pris en charge. Le seul personnage qui semble avoir toute sa tête est le jeune Yoni. C'est d'ailleurs à travers ses yeux et sa vie qu'on voit l'histoire se dérouler. À l'origine, Mabul était un court métrage, tourné il y a 10 ans.

«Le court métrage se concentrait sur la relation fraternelle entre Yoni et Tomer, explique Guy Nattiv. Le long métrage développe à fond l'histoire de la famille et de l'entourage de Yoni. Je sentais qu'en 20 minutes, mon histoire n'allait pas assez loin. Disons que c'était mon prototype en vue du long métrage.»

Le film gagne évidemment en profondeur et en complexité, ce genre de complexité qui existe au sein des relations humaines et familiales et qui se vivent plus souvent (et heureusement...) au cinéma.

«Toutes les familles ont leurs problèmes, qu'elles soient israéliennes, canadiennes, américaines... Mais mon film porte surtout sur la communication. C'est la base non seulement d'une bonne harmonie, mais aussi du début du règlement d'un problème», explique le cinéaste.

Les membres de la famille Roshko, d'abord ébranlés par le retour de Tomer, finiront tous par être transformés au contact de cet être vulnérable incarné avec justesse par Michael Moshonov, un acteur israélien bien en vue, tout comme Ronit Elkabetz qui incarne sa mère.

«Michael a été très consciencieux lors de la préparation de ce rôle, d'autant plus difficile qu'il est pratiquement muet, raconte M. Nattiv. Pendant des semaines, il a visité des centres pour personnes autistes pour étudier leurs gestes, leurs regards, leurs manières de se comporter. Je ne voulais évidemment pas d'un autiste comme l'était Dustin Hoffman [dans Rain Man], qui incarnait quelqu'un de très bavard.»

En vertu d'une contribution financière canadienne à la production de son film, Guy Nattiv dit avoir beaucoup aimé travailler avec des artisans québécois.

«Philippe Lavallette est un excellent directeur photo et Patrick Watson a signé la trame sonore, remplaçant Catherine Major qui n'était plus disponible. J'espère pouvoir retravailler avec eux; ils ont été formidables.» Discrète mais instantanément reconnaissable, la musique originale de Watson (surtout instrumentale) allège la tension qui se construit entre les différents protagonistes du récit.

Mabul (The Flood) est présentement à l'affiche.