De Marie-Antoinette à Moubarak ou Kadhafi, toutes les fins de règne se ressemblent. C'est du moins la conviction du cinéaste Benoit Jacquot qui, hier, a eu l'insigne honneur de casser la glace (ou de faire fondre la neige) et d'ouvrir la 62e Berlinale avec Les adieux à la reine, adaptation pour le cinéma du roman de Chantal Thomas.

Le film met en vedette Diane Kruger, Virginie Ledoyen et la jeune Léa Seydoux, et raconte les trois derniers jours à Versailles avant que n'éclate la révolution et que ne roulent les têtes de la monarchie. Diane Kruger, actrice franco-allemande, y interprète une Marie-Antoinette tendance lesbienne, qui oscille entre l'insouciance, la panique et le désespoir, très différente de la Marie-Antoinette frivole et désoeuvrée de Sophia Coppola.

D'aucuns ont déjà qualifié le film de Gosford Park français parce que c'est le point de vue des domestiques et tout particulièrement de la lectrice de la reine, interprétée par Léa Seydoux, qui prime. Mais en réalité, ce qui intéressait le cinéaste, c'était de mettre en scène une «groupie» tellement obnubilée par la reine qu'elle ne voit pas que le monde autour d'elle s'effondre.

«Ce film porte sur la difficulté de prendre conscience des bouleversements qui s'opèrent devant nous», a lancé le scénariste Gilles Taurand en conférence de presse. Tourné souvent à l'épaule avec une caméra numérique, le film nous entraîne dans les cuisines et les antichambres de Versailles et capte, avec une frénésie toute moderne, la vie quotidienne sur fond de fin de règne.

Accueil poli

Vu les bouleversements politiques de la dernière année, Les adieux à la reine était un film d'ouverture tout à fait de circonstance. Pourtant, il a été accueilli poliment et sans grand enthousiasme par la presse internationale. En revanche, l'enthousiasme était au rendez-vous lors de la présentation du jury présidé par le cinéaste britannique Mike Leigh et réunissant les acteurs Jake Gyllenhaal, Charlotte Gainsbourg, Barbara Sukowa, les cinéastes François Ozon, Anton Corbjin et Asghar Farhadi et l'écrivain algérien Boualem Sansal.

Répondant souvent à la place de ses camarades qui n'avaient pas l'air très réveillés, Mike Leigh n'a cessé de lancer des fleurs à un festival dont il a vanté l'esprit, l'atmosphère, la joie de vivre et... l'hiver, qui force la chaleur et le rapprochement. Un peu plus et Mike Leigh avouait que c'était lui qui avait commandé la bordée de neige qui est tombée sur la Berlinale hier matin. Heureusement, il s'est retenu.