Adapté de l'oeuvre d'Anne Hébert, Le torrent, nouveau film de Simon Lavoie (Le déserteur, Laurentie) plonge au coeur de la vie de personnages troublés. La Presse a assisté au tournage, à Lachute, en présence de Laurence Leboeuf et de Victor Andrés Trelles Turgeon, deux des principaux comédiens.

Les pauses sont rares sur le plateau de tournage du Torrent, malgré le froid humide. Dans un décor beau et sauvage de Lachute, où des flocons tombent du ciel avec légèreté, le réalisateur Simon Lavoie harangue son équipe. Le temps presse. La tension monte à mesure que le soleil descend. Entre deux prises, Laurence Leboeuf reste à sa place. À peine le temps de retoucher le maquillage et l'équipe reprend le tournage.

«Ce sont des journées difficiles, dira-t-elle en entrevue, en fin de journée. On est loin de tout, que ce soit une salle de bains ou une voiture chauffée. Dans ce temps-là, il faut plonger, se concentrer sur son travail. Si on se met à combattre le froid, on n'en finit plus.»

L'histoire se déroule dans les années 20-30 dans le Québec profond où les trois personnages principaux sont des êtres aux âmes grises et troublées. Mère célibataire, Claudine (Dominique Quesnel) souhaite voir son fils François (Victor Andrés Trelles Turgeon) devenir prêtre afin d'expier son péché. Lorsque François refuse d'entrer au séminaire, elle le frappe à la tête avec un trousseau de clefs, ce qui le rendra définitivement sourd. Puis, peu de temps après la mort de sa mère, François achète Amica (Laurence Leboeuf), jeune fille farouche et apeurée, d'un colporteur innu (Marco Bacon).

Une histoire tordue, faite de violence et de silences, d'êtres tourmentés que le spectateur suivra au fil de quatre saisons. Tous les ingrédients pour charmer Laurence Leboeuf.

«Nos personnages, à Victor et moi, sont comme de petits animaux sauvages qui essaient de se comprendre», dit la comédienne qui n'a pas lu le livre d'Anne Hébert, pour mieux coller au scénario. «J'ai capoté sur Amica. J'aime tout ce qui est mystique, ces histoires où les êtres viennent d'endroits inconnus. J'aime beaucoup la langue innue, la culture, la tradition qui est proche de la nature.»

«François essaie de comprendre l'homme qu'il est devenu», précise, de son côté, Victor Andrés Trelles Turgeon au sujet de son personnage. «Il ne sait pas comment verbaliser son besoin de contact humain. C'est pour cela qu'il achète Amica.»

Selon le producteur Sylvain Corbeil de Metafilms, la distribution des rôles était primordiale. «Comme il y a peu de rôles, une bonne partie du film repose sur le jeu des comédiens», dit-il.

Un petit budget

Selon M. Corbeil, comme pour son partenaire Jacques Blain de Lusio Films, la production a fait des miracles avec un budget de 2,8 millions de dollars.

«On a des coûts supplémentaires parce qu'on a tourné la majorité des scènes dans des lieux extérieurs, à Sainte-Ursule (Mauricie), au Village québécois d'antan (Drummondville), au parc de Plaisance (Outaouais), au collège Notre-Dame et au collège de Terrebonne, ajoute M. Corbeil. De plus, c'est un film d'époque où il y a des animaux.»

À Lachute, où la majorité des scènes du film a été tournée, l'accès au terrain a été gratuit, mais il a fallu apporter bien des modifications intérieures et extérieures à la maison ancestrale pour en faire la résidence de Claudine.

Lors de notre passage, l'équipe tournait une seule scène comptant une quinzaine de plans. Dans le film, elle occupera sept à huit minutes, selon M. Corbeil.

Après 35 jours de travail, le tournage a pris fin il y a quelques jours. Le film devrait être terminé au début du mois de mai. À temps pour le Festival de Cannes. Il sortira sur les écrans à une date inconnue.