Deux ans après Sherlock Holmes, Robert Downey Jr. et le réalisateur Guy Ritchie refont équipe pour se livrer à A Game of Shadows, où le célèbre détective privé affronte le machiavélique professeur Moriarty (Jared Harris) et se fait une alliée: une gitane incarnée par Noomi Rapace. Entrevue exclusive avec l'ex-Lisbeth de Millenium.

D'entrée de jeu, la surprise. Noomi Rapace n'est pas efflanquée et inquiétante. Elle n'est pas la Lisbeth Salander de la trilogie Millenium. En fait, de physique comme d'aura, c'est à peine si elle lui ressemble.

«Je suis une actrice! Je peux être ce que vous voulez», a-t-elle assuré, souriante, au début de l'entrevue exclusive qu'elle a accordée à La Presse.

Et elle le prouve dans A Game of Shadows de Guy Ritchie, où elle devient Sim la gitane, qui seconde Sherlock Holmes (Robert Downey Jr.) et le docteur Watson (Jude Law) dans un formidable jeu d'énigmes où ils affrontent, de l'Angleterre à la Suisse en passant par la France et l'Allemagne, le machiavélique professeur Moriarty (Jared Harris).

Mais pour pouvoir prouver sa polyvalence au monde, elle a dû convaincre ceux qui avaient le pouvoir de l'engager. «Niels Arden Oplev, le réalisateur du premier volet de Millenium, m'avait vu dans un film suédois et quand mon nom est apparu pour incarner Lisbeth, il a eu des doutes, il me trouvait trop féminine et mignonne pour le rôle», poursuit l'actrice qui, depuis, doit prouver l'inverse: qu'elle peut être autre chose qu'une punk vivant sur la ligne qui sépare le génie et la folie.

Sauf que Lisbeth a changé sa vie. C'est cette performance qui a amené Ridley Scott à l'engager pour son pré-Alien, Prometheus. C'est aussi cette performance qui l'a fait voyager dans le monde, sortir de l'anonymat... et apprendre l'anglais. À la suite d'une expérience qui l'a profondément humiliée: «C'était il y a trois ans. Je participais à une conférence de presse qui se déroulait en anglais, langue que je ne parlais pas. Il y avait tous ces gens autour de moi et je ne pouvais pas m'exprimer, c'était horrible.»

Elle a quitté les lieux avec l'intention de faire sienne cette langue. Elle l'a apprise par elle-même. Comme tout, depuis toujours: «Je ne dois pas grand-chose à l'école, rigole-t-elle. À l'adolescence, je buvais, j'avais un comportement chaotique, je faisais tout sauf étudier.»

Mais Noomi Rapace a une volonté de fer. Elle est comme un oiseau de proie au-dessus de ses buts. Elle ne rate pas ses cibles. Parmi lesquelles se trouvait Hollywood? «Dans un sens, oui. J'ai survécu grâce à des films comme Dog Day Afternoon, Raging Bull, Thelma and Louise... J'ai su très jeune que je voulais faire partie de ce monde-là, mais pas pour devenir célèbre. Ce que je veux, c'est être respectée.»

C'est de ces films chéris et de sa vision du métier qu'elle a parlé avec Robert Downey Jr. quand elle l'a rencontré à Los Angeles, six semaines avant le début du tournage de A Game of Shadows. Après, les choses ont déboulé. La rencontre avec Guy Ritchie, à Londres. Puis la «création» de Sim - à laquelle l'actrice a apporté plus qu'un grain de sel: «Au départ, Sim devait s'exprimer avec un accent français, mais j'ai proposé d'intégrer du rom dans son langage et de lui donner un accent de l'Est. Cela donnait plus de sens pour moi», explique Noomi Rapace - qui n'a par contre pas eu le temps de traverser la Transylvanie et de vivre dans des camps gitans comme elle l'espérait le faire en guise de recherche.

Perfectionniste. Mais pas maniaque comme la Lisbeth qui l'a habitée pendant un an et demi - et dont elle s'est départie avec un certain soulagement: «Ça a été une expérience très intense, j'ai changé quand elle était en moi et ça n'a pas été facile pour mes proches. Le soir où on a célébré la fin du tournage, tout le monde buvait du champagne. Moi, j'étais dans les toilettes, malade.» Comme si elle vomissait, littéralement, Lisbeth.

Bref, quand on l'a sollicitée pour reprendre le rôle dans une hypothétique adaptation du quatrième roman, elle a refusé. C'était avant les rumeurs d'une nouvelle version américaine. Pour laquelle, elle n'a pas été contactée. Si ç'avait été le cas, elle aurait dit non. Ce qui n'empêche pas sa curiosité pour le film de David Fincher et la performance de Rooney Mara dans The Girl With the Dragon Tattoo. «Ils vont certainement faire quelque chose de différent. Autrement, ça n'aurait pas de sens.» Et l'absence de sens, Noomi Rapace ne comprend pas.

Sherlock Holmes - A Game of Shadows (Sherlock Holmes - Le jeu des ombres) prend l'affiche le 16 décembre.

Les frais de voyage ont été payés par Warner Bros.