Patrice Leconte est de passage à Montréal pour présenter son plus récent film Voir la mer à Cinemania, mais aussi pour travailler sur son premier film d'animation, Le magasin des suicides.

La dernière fois qu'il nous avait donné de ses nouvelles directement, Patrice Leconte avait annoncé son intention de prendre sa retraite de cinéaste après le tournage de trois ou quatre films.

«Honnêtement, je ne sais pas ce qui m'a pris, a confié hier le réalisateur français en entrevue avec La Presse. Mais qu'est-ce que c'était que cette annonce ridicule formulée comme une menace? Je crois que ça découlait d'une espèce d'accumulation de plein de choses. Et d'une crainte de perdre l'envie. J'étais en train de me perdre dans une espèce de système qui m'éloignait de ce que j'aime faire vraiment.»

Depuis l'époque où il a enchaîné Les Bronzés 3, Mon meilleur ami et La guerre des Miss, Patrice Leconte a pu se refaire une petite santé artistique. Il s'est mis à l'écriture de romans et a mis en scène au théâtre. Il s'est aussi lancé dans l'écriture et la réalisation de Voir la mer, un «petit film charmant», sorte deroad movie sentimental et lumineux dans lequel deux frères (Nicolas Giraud et Clément Sibony) tombent amoureux de la même fille (Pauline Lefevre). Et elle des deux frères.

«Je n'aurais jamais pu écrire cette histoire si j'avais l'âge des personnages, dit-il. Il faut du recul. J'avais aussi envie de revenir à quelque chose de plus léger, de plus insouciant, de plus sentimental, de plus sensuel, bref, de plus personnel. Grâce à Voir la mer, tourné de façon modeste avec une petite équipe et sans vedettes, j'ai retrouvé l'enthousiasme du premier long métrage. Et puis, j'aime le caractère un peu subversif de ce film.»

Pour l'instant, aucun distributeur québécois n'a encore enrichi son catalogue de Voir la mer. L'accueil du public de Cinemania aura peut-être un rôle à jouer dans le sort d'un film qui, en France, n'a pas obtenu le succès escompté.

«Le distributeur français a sorti le film en dépit du bon sens, affirme le cinéaste. Quand un film ne fait pas autant d'entrées que prévu, il devient alors bien difficile de le vendre à des distributeurs étrangers.»

Un premier film d'animation

Patrice Leconte travaille aussi sur son tout premier film d'animation. Le magasin des suicides est l'adaptation du roman de Jean Teulé. Qui prend ici la forme d'un film animé musical en relief 2D.

«Je connaissais - et aimais - déjà le roman, mais il était inadaptable à mes yeux, du moins en prises de vues réelles, explique-t-il. Quand un producteur, qui connaissait probablement mon goût pour le dessin et la bande dessinée, m'a proposé d'en faire un film d'animation, tout s'est éclairé. Et cela s'est tricoté très vite.»

Le magasin des suicides est une coproduction entre la France, le Québec et la Belgique. La société montréalaise Toutenkartoon participe au projet.

«Je retire d'ailleurs une petite fierté du fait que le film soit entièrement fabriqué dans des pays francophones, précise le réalisateur. À Angoulême et à Montréal, des équipes s'occupent de l'animation des personnages et de tous les éléments qui bougent. À Liège, les animateurs sont chargés des décors. J'ai choisi le relief 2D car je tiens à conserver l'aspect plus artisanal du dessin. Le film ressemble parfaitement à ce que j'avais imaginé au départ.»

Patrice Leconte espère pouvoir lancer Le magasin des suicides au Festival de Cannes.

«J'adorerais cela car j'ai vécu de très beaux moments à Cannes grâce à Monsieur Hire et Ridicule. Il n'y a toutefois encore rien de concret à cet égard. Pour le moment, j'en rêve. Le problème de la montée des marches se pose, cela dit. Comme ce ne sont pas des stars qui prêtent leurs voix aux personnages, un choix délibéré de ma part, je devrai me faire accompagner de silhouettes découpées sur le tapis rouge!»

Voir la mer est présenté aujourd'hui à 19h30 et demain à 11h au Cinéma Impérial.