Le réalisateur flamand Geoffrey Enthoven vit une belle relation avec le Québec. En 2009, son film Les filles (The Over the Hill Band) a remporté le prix du public au Festival d'Abitibi-Témiscamingue. En août dernier, il a décroché le Grand prix des Amériques et le Prix du public au Festival des films du monde avec Hasta la Vista, son plus récent opus. La Presse l'a rencontré.

Tout a commencé par un documentaire britannique portant sur un jeune Anglais très handicapé qui décide de se rendre jusqu'en Espagne dans le but d'y perdre sa virginité. Là-bas existe un bordel où l'on accueille les gens tels qu'ils sont. L'homme a tellement aimé son expérience qu'il a lancé un appel sur l'internet pour se trouver des potes et y retourner. Deux autres personnes handicapées ont répondu présent. Et la chevauchée est repartie.

«Lorsque mon producteur m'a parlé de cette histoire, nous étions au bureau en train de faire la vaisselle, raconte Geoffrey Enthoven, réalisateur flamand qui signe le très hilare long métrage Hasta la Vista inspiré de cette histoire vraie. À mesure qu'il me racontait cette affaire, je voyais les images défiler. Je trouvais ça dingue. Et en même temps, très honnête. Moi aussi, lorsque j'avais 18 ans, je voulais aller en Espagne pour rencontrer une nana. Tous les jeunes font ça!»

Le réalisateur a pris contact avec les personnes à la tête du documentaire intitulé For One Night Only, dont le personnage principal est Asta Philpot. Il leur a demandé de collaborer à son film de fiction. Car plusieurs éléments ont été modifiés. À commencer par le fait que dans Hasta la Vista, les trois compères, Philippe, Jozef et Lars, quittent la Belgique pour l'Espagne à la barbe de leurs parents.

«Dans le documentaire, les parents accompagnaient les voyageurs, observe le cinéaste. Même si l'idée de base est intacte, notre histoire est bien différente de la réalité. Nous ne voulions pas répéter la même chose. Quand on fait une fiction, ça doit être un film d'aventure, qui parle ici de l'amitié, de la liberté.»

L'amitié sans aucun doute

Amitié! Le mot revient souvent dans l'entrevue. Geoffrey Enthoven est fier de constater que c'est avant tout ce sentiment humain que les spectateurs ont retenu.

«Lorsque nous avons fait des séances-tests, les gens devaient répondre à un questionnaire où il y avait des mots tels amitié, handicapés, voyage, sexualité, amour, liberté. À 95%, ils encerclaient le mot amitié. Et presque seulement ce mot. Ils oubliaient avoir affaire à des personnes handicapées.»

Au départ, M. Enthoven souhaitait faire le tournage avec des personnes handicapées. «J'étais convaincu de découvrir des talents. Mais c'était difficile, avoue-t-il. Il fallait que je sois sûr que la chimie passe entre les trois personnages, comme dans Les filles. Après quelques mois, je me suis concentré sur le personnage de Philippe. Nous avions trouvé une personne capable de jouer ce rôle. Mais le candidat proposait un personnage plutôt triste, alors que, dans le film, il est très marrant.»

Les trois acteurs du film ne sont donc pas des personnes handicapées. Ils ont toutefois plongé dans cette réalité, assure le cinéaste. «Robrecht Vanden Thoren (Philippe) a passé un mois dans un fauteuil roulant. Il lui est arrivé d'être incapable de monter sur un trottoir avec son fauteuil. Comme personne ne l'aidait, il s'est fâché, s'est levé et a poussé son fauteuil sous le regard ébahi des piétons.»

Les trois personnages ont beaucoup de caractère. Et pas toujours dans le bon sens. Enthoven a ainsi voulu montrer que chacun a ses limites.

«Dans le film, les trois garçons apprennent à rigoler de leurs limites, dit-il. Au fond, chez eux, le voyage est plus important que la destination.»

Hasta la Vista sort en salle le 30 septembre.