Les stratégies de Bell Canada pour réduire ses coûts ont incité ses détaillants indépendants à poursuivre la plus importante entreprise de télécommunications au Canada pour 200 millions de dollars dans une chicane de famille à propos de commissions réduites.

L'Association canadienne des dépositaires indépendants en communications (ACDIC) a fait savoir hier qu'elle avait intenté des recours au Québec et en Ontario, alléguant que Bell n'avait pas respecté son contrat avec le groupe. L'Association, qui dit représenter 172 magasins actifs sous les bannières Bell, Bell World, Bell Mobility, Espace Bell et Bell Mobilité, cite «une détérioration de nos relations qui s'est accélérée sous la direction actuelle de Bell au cours des trois dernières années».

 

Doris Ronca, présidente de l'ACDID et propriétaire de deux magasins Espace Bell à Montréal, a précisé que le groupe avait tenté de négocier de bonne foi avec Bell pour régler les différents problèmes auxquels il fait face.

«Malheureusement, nous sommes dans une impasse et nous n'avons pas d'autre choix que de nous adresser aux tribunaux», a-t-elle dit au cours d'une entrevue.

Les détaillants ont déjà eu maille à partir avec Bell auparavant et ils ont intenté une poursuite de 135 millions en 2006 à propos d'une tentative avortée des détaillants de transformer leur réseau en une fiducie de revenu. La cause est pendante et pourrait être jugée l'an prochain.

Les détaillants nourrissaient l'espoir de fusionner leurs commerces en une seule entreprise et de l'inscrire à la Bourse, mais l'entreprise a exercé son veto contre le projet avant que le gouvernement conservateur impose une taxe sur les nouvelles fiducies à partir de 2011. Une porte-parole de Bell a soutenu hier que l'entreprise se défendrait vigoureusement dans cette nouvelle affaire.

Julie Smithers a cependant refusé de discuter des aspects spécifiques des allégations, ajoutant toutefois que Bell met l'accent sur le service à la clientèle. L'entreprise a accru le nombre de ses propres magasins et des commerces de détaillants en plus d'ouvrir un centre d'appels au Nouveau-Brunswick.

Pour leur part, les détaillants indépendants affirment que leur avantage concurrentiel a été rogné par les incitatifs lucratifs consentis aux détaillants non exclusifs tels que Wireless Wave, Best Buy et Future Shop.

En outre, les prix plus bas consentis par Bell grâce au marketing direct nuisent à la chaîne de détaillants, a dit Mme Ronca.

Celle-ci a mis Bell au défi de restaurer les commissions ou de permettre aux détaillants d'abandonner le nom de Bell pour vendre des produits de concurrents tels que Telus, Rogers Communications et de nouveaux acteurs dans le téléphone sans fil.

Selon les plaignants, Bell a fait fi d'un engagement en mars dernier de ne pas modifier les commissions et les honoraires des détaillants jusqu'à la mi-2009.

L'ACDIC affirme également que les commissions relatives à la vente de nouveaux produits ont été abaissées d'une proportion oscillant entre 10% et 20%.

Les répercussions de la situation présente se traduiront par le licenciement de plus de 300 employés dans des magasins du Québec et de l'Ontario étant donné qu'ils perdent 17,5 millions en commissions jusqu'en décembre, a dit Mme Ronca.

Les détaillants soutiennent que la valeur de leur commerce a chuté de 30% à 40% au cours des trois dernières années et ils accusent les cadres supérieurs de Bell de sabrer leurs commissions et leurs honoraires pour obtenir de fortes primes personnelles s'ils atteignent certains objectifs financiers.