Ils ont fait le planton toute la nuit, ils sont rompus mais heureux: des centaines de Japonais, privés de la précédente version, se sont précipités vendredi sur le téléphone multimédia iPhone 3G d'Apple, un objet dont ils louent d'avance l'esthétique et le mode d'emploi.

«Je trouve son ergonomie révolutionnaire, même si les terminaux japonais sont aussi truffés de fonctions, comme la télévision ou le porte-monnaie électronique», s'excite un impatient qui a dormi à la belle étoile devant une immense boutique d'électronique, Bic Camera, au coeur de Tokyo.

À midi, après une longue mise en scène et un compte à rebours devant des dizaines de caméras et appareils photos, le téléphone multimédia à écran tactile iPhone 3G est lancé au Japon.

Contre toute attente, c'est le troisième opérateur local, Softbank (19 millions d'abonnés), qui a obtenu la primeur de cette commercialisation au pays de la high-tech, au nez et à la barbe du numéro un et pionnier mondial des télécommunications mobiles, NTT DoCoMo (53 millions de clients).

Même si Softbank ne bénéficie pas d'une exclusivité ad vitam aeternam, le richissime PDG du groupe, Masayoshi Son, a réussi son pari de créer une fois de plus des remous dans le secteur, doublés d'un assourdissant bruit médiatique.

«Je suis vraiment heureux», lance-t-il tout sourire sur un podium devant Bic Camera, vêtu d'un T-Shirt noir «iPhone 3G Softbank», aux côtés d'une pimpante starlette japonaise.

Pendant ce temps, environ 300 acheteurs potentiels prennent leur mal en patience, assis sur le trottoir en attendant de rejoindre un comptoir d'abonnement.

Bouteille de thé vert et «nigiri» (boules de riz fourrées) à midi, ils s'éventent tant bien que mal sous un soleil de plomb, au son des hurlements des vendeurs qui canalisent la foule et les hordes de journalistes.

Ils y passeront la journée, mais ne sont pas les plus à plaindre. Les premiers arrivés là ne rongent en effet leur frein que depuis la veille au soir, alors qu'à quelques kilomètres, parmi les 1500 individus postés devant une boutique Softbank, certains ont campé pendant trois nuits. Ici, la vente débutait exceptionnellement à 7 heures du matin.

Nul, hormis l'opérateur et Apple, ne sachant combien de terminaux sont disponibles, les plus fanatiques, affolés à l'idée de repartir bredouilles, ont sacrifié leur sommeil et même pris des jours de congé pour faire le guet.

Si un tel phénomène s'observe fréquemment au Japon lors de la sortie de produits électroniques attendus --à commencer par les nouvelles consoles de jeux vidéo des nippons Nintendo et Sony-- c'est la première fois qu'un téléphone étranger suscite uen telle effervescence.

Le marché japonais, 50 millions de mobiles par an, est en effet monopolisé depuis l'origine par une dizaine d'acteurs locaux (Sharp, Panasonic, NEC, Fujitsu, etc), ces derniers proposant des modèles conformes aux desiderata des opérateurs et adaptés aux habitudes des exigeants clients nippons.

«Plus qu'un téléphone, c'est une «machine internet», cet iPhone 3G», répète à l'envi Masayoshi Son. L'homme d'affaires espère surtout que l'objet sera un moulin à argent et un aspirateur de nouveaux clients, ce qui ne se verra toutefois que dans plusieurs mois.

Quelque 90% des 500 Nippons de 20 à 49 ans interrogés mi-juin par la société d'études marketing Ishare affirmaient toutefois qu'ils n'avaient pas l'intention d'acquérir un iPhone 3G.