La pub est très envahissante. Omniprésente dans «la vraie vie». Il ne lui reste plus qu'à envahir l'univers parallèle de jeu vidéo. À les placarder de logos d'entreprise. Les anglos ont déjà baptisé le phénomène «advergaming», une expression qu'on pourrait librement traduire par «jeublicité».

La pub est très envahissante. Omniprésente dans «la vraie vie». Il ne lui reste plus qu'à envahir l'univers parallèle de jeu vidéo. À les placarder de logos d'entreprise. Les anglos ont déjà baptisé le phénomène «advergaming», une expression qu'on pourrait librement traduire par «jeublicité».

Le Réseau éducation-médias, un organisme-ressource visant à développer l'esprit critique des jeunes face aux médias, définit ainsi la jeublicité: «Elle consiste à créer des jeux, que l'on retrouve sur les sites Web des annonceurs, où l'on place au centre de l'action des personnages affublés de logos de la compagnie. Elle permet aux annonceurs de dissimuler leur marque de commerce dans un contenu de divertissement.»

Pour attirer les jeunes, ce type de publicité est en pleine croissance. Des marques comme Nike, Kellogg et Pepsi s'y sont déjà mises. Au Canada, la Coupe Rogers, le fameux tournoi de tennis ayant lieu à Montréal et à Toronto, vient tout juste de créer son propre jeu publicitaire, une conception montréalaise signée Revolver3.

«Tennis Canada a créé ce micro jeu de tennis dans le but d'attirer les jeunes amateurs de sport, explique Pascal Beauchesne, de Revolver3. C'est du marketing à long terme: on ne vise pas à leur vendre des billets dès cette année, mais on les intéresse au tennis.»

Ce jeu publicitaire sera mis en ligne dans deux jours, soit vendredi. Il est exclusif au volet montréalais de la Coupe Rogers, les organisateurs de l'événement torontois n'ayant pas voulu embarquer dans le projet.

Une succursale sur la planète Xbox

Créer un jeu vidéo publicitaire téléchargeable n'est qu'une facette de la jeublicité. Une autre consiste à acheter de l'espace publicitaire dans un jeu vidéo à plus grand déploiement. Le parallèle avec le cinéma est tentant: on crée un court métrage d'entreprise, ou on fait un placement de produits dans une superproduction ciblant sa propre clientèle.

«La différence est que le jeune est moins passif devant un jeu que devant un film», nuance Pascal Beauchesne. Par exemple, un joueur qui s'est inscrit au jeu Second Life, qui consiste à vivre une vie imaginaire dans un monde virtuel basé sur Internet (https://secondlife.com), peut habiller son avatar dans une boutique de la chaîne American Apparel.

Les dirigeants de la chaîne de vêtements n'ont qu'à espérer que les joueurs reproduiront ensuite ce comportement dans la vraie vie. Plusieurs entreprises pourraient tirer profit de ce type de publicité pour le moins underground.

Un exemple? Les dépanneurs Couche-Tard. «Les jeunes sont une cible payante, mais difficile à rejoindre, dit le porte-parole de Revolver3. Couche-Tard a connu du succès avec sa Sloche, il pourrait essayer de la vendre dans un jeu vidéo...»

Le géant québécois de l'alimentation peut s'offrir une visibilité dans un jeu vidéo de portée globale. Après tout, il possède de nombreuses succursales un peu partout en Amérique du Nord. Pour une entreprise de moins grande envergure, investir dans la jeublicité est une aventure un peu plus délicate, mais il semble y avoir un type de jeu vidéo pour chaque consommateur: Internet, consoles de salon, cellulaires, etc.

De la pub dans tous les jeux

La publicité dans les jeux vidéo est à peine naissante. Son volume en 2005 se chiffrait à 54 millions US, une goutte dans l'océan publicitaire. D'ici 2010, on s'attend à ce que sa valeur totale atteigne 734 millions US, sans compter la pub dans les jeux sur téléphones cellulaires ou sur Internet.

Pour placer sa pub dans un jeu vidéo, les entreprises n'ont qu'à contacter les développeurs. Electronic Arts, qui a confié la création du prochain jeu de la série NHL hockey à ses bureaux montréalais, prend elle-même les commandes. Avis aux intéressés qui aimeraient s'afficher sur la bande d'une patinoire virtuelle de la LNH...

De son côté, Microsoft a récemment acheté la boîte new-yorkaise Massive, la plus importante agence de création publicitaire axée exclusivement sur les jeux vidéo. Microsoft entend placarder de publicité son service en ligne Xbox Live, qui rejoint plusieurs millions de joueurs âgés entre 14 et 35 ans.

À Montréal, où il existe une forte concentration de développeurs de jeux vidéo, plusieurs agences s'intéressent de plus en plus à ce nouveau média. Bref, le jour où votre ado reviendra à la maison vêtu d'un t-shirt American Apparel et sirotant une Sloche, comme dans sa deuxième vie imaginaire, n'est peut-être pas très loin...