«Votez Équipe Embeaume!» Oui, il y a faute, et c'est voulu. Le site du maire Régis Labeaume a été parodié hier matin alors qu'un clone à saveur satirique a fait son apparition sur la toile. Une sorte d'entartage virtuel.

Au premier coup d'oeil, la ressemblance est frappante. La mise en page est à se méprendre avec celle du site officiel, equipela beaume.ca. Mais bien vite, des détails détonnent sur la version .com. D'abord, cette photo en en-tête du Manège militaire en ruine. Pas une image très glorieuse pour Québec. Puis ces citations tirées de la presse qui ne montrent par le maire sous son meilleur jour.

Bien vite, ça saute aux yeux. Le logo a beau avoir été calqué avec minutie, toutes les références à Équipe Labeaume ont fait place à Équipe Embeaume. Clairement, le site est une parodie.

Il suffit ensuite de cliquer sur n'importe quel lien pour découvrir le pot aux roses. Tout comme sur le site officiel, la page d'accueil propose une vidéo du maire. «Et patati et patata, petite patate tant pis pour toi», de répéter une voix superposée à l'image de M. Labeaume.

Les 27 candidats du maire ont été remplacés par six clowns. Comme Bozo Leclair, dont les principaux points forts sont de s'être «déjà inscrite pour faire des études» et d'être «membre d'une caisse populaire». Même la photo officielle du maire a été trafiquée, un graphiste lui ayant ajouté grossièrement un chapeau de clown, un nez rouge et un noeud papillon.

Une autre section semble ridiculiser les projets du maire. Sur une photo aérienne de Québec, on voit apparaître graduellement un «Bizness Plateau» à l'emplacement de l'Assemblée nationale. Puis, un quartier chinois pousse, suivi d'une cité médiévale sur la Citadelle, un parc d'attraction dans le port et des plates-formes pétrolifères dans le fleuve l'année suivante. Enfin, Québec ressemble résolument à New York en 2014.

Difficile pour l'instant de retracer l'instigateur du site. Celui-ci a fourni un faux nom et une fausse adresse pour s'enregistrer. La fausse piste virtuelle laissée par le créateur commence en France pour aboutir au siège social de la Société d'assurance automobile du Québec.

Le Soleil a réussi à retracer un homme ayant été propriétaire de equipelabeaume.com, mais celui-ci assure n'avoir aucun lien avec les créateurs du site. «J'achète et je revends des adresses. J'en ai plus de 150. En un an, je n'ai pas eu un seul clic, alors je l'ai laissé tomber en juin», a-t-il confié sous le couvert de l'anonymat.

Labeaume ne rit pas

Régis Labeaume n'a pas trouvé très drôle hier de se faire rebaptiser «Bozo Embeaume Premier». «J'aime mieux [André-Philippe] Côté du Soleil et Ygreck, c'est beaucoup plus drôle», a-t-il dit au sujet des deux principaux caricaturistes de Québec qui se plaisent souvent à exagérer ses traits. Vexé? «C'est la vie, quand même que je me fâcherais, ça ne donnerait rien.»

Reste que son parti a néanmoins tenté de faire fermer la page. Mais ces efforts ont été vains, les auteurs n'ayant eu qu'à changer de serveur pour rester en ligne.

Au sein des candidats de l'Équipe Embeaume, pardon, Labeaume, les opinions étaient mitigées sur l'impact que pouvait avoir ce clone du site Internet officiel du parti. «Je prends ça avec un grain de sel. Ça doit demeurer une farce et ça ne doit pas dénigrer la fonction [de politicien]», croit le candidat Patrick Paquet (district Neufchâtel).

Tandis que le candidat Steeve Verret (Lac-Saint-Charles-Saint-Émile) considérait cette parodie comme un manque de respect pour le travail de conseiller, Sylvain Légaré, qui se présente dans Val-Bélair, affichait un large sourire. «Moi, j'ai le sens de l'humour et je trouve ça très drôle.»

Un spécialiste en communication politique, Thierry Giasson, y voit un avertissement pour le maire. «M. Labeaume n'administre pas un village de 25 personnes. Il y a peut-être des attentes par rapport à l'image que doit projeter un maire. Le site qui rappelle plusieurs citations de M. Labeaume dit de faire attention, quand on dit quelque chose en présence de qui que ce soit, ça peut être rapporté et devenir un problème.»

Ce dernier souligne la fréquence des attaques virtuelles contre les politiciens. En 2008, le Parti conservateur avait brièvement mis en ligne de fausses pages Facebook pour véhiculer des rumeurs sur certains de leurs adversaires, rappelle-t-il.

Régis Labeaume, qui a donné son nom à son parti politique, semble avoir quelque peu perdu le contrôle sur l'utilisation de son nom dans Internet. Rappelons que l'adresse regislabeaume.com appartient toujours à une citoyenne de Québec, Julie Graff. Tout en assurant ne pas être derrière le site d'Équipe Embeaume, celle-ci confirme avoir accepté de prêter l'adresse virtuelle à l'animateur de radio Jean-François Fillion le temps de la campagne. En attendant que ce dernier confirme sa participation, celle-ci mène d'ailleurs au site de sa radio Internet, radiopirate.com.

Avec la collaboration de Jean-François Néron