Condamné en 2007 pour avoir diffusé sans autorisation le film «Joyeux Noël», Dailymotion a récemment été blanchi en appel, un arrêt inédit qui pourrait mettre fin aux querelles judiciaires engagées par l'industrie du cinéma contre la plate-forme vidéo.

 «C'est la première fois qu'une cour d'appel confirme notre statut d'hébergeur. On pense avoir vraiment tourné la page» des batailles judiciaires, se réjouissait lundi le directeur juridique de Dailymotion, un site qui revendique quelque 55 millions de visiteurs.

La fronde contre cette plateforme qui permet aux internautes de mettre en ligne des vidéos s'est de toute façon calmée depuis quelque temps, reconnaît Guiseppe de Martino, parlant d'une année entière sans assignation.

Le dossier tranché mercredi par la cour d'appel de Paris remonte à 2007. Constatant que Dailymotion diffusait le film «Joyeux Noël», sorti en salles fin 2005, le réalisateur Christian Carion, le producteur Nord-Ouest Production et distributeur UGC Images avaient assigné le site en contrefaçon.

Comme dans de nombreuses autres décisions, le tribunal de grande instance de Paris avait, le 13 juillet 2007, reconnu à Dailymotion le statut de simple hébergeur, et non d'éditeur, responsable de ses contenus.

En dépit de ce statut, le tribunal avait jugé le site coupable de contrefaçon et l'avait condamné à verser 23.000 euros de dommages et intérêts.

Les magistrats avaient considéré qu'«en acceptant la mise en ligne par un utilisateur de son service» de ce film vu en salle par deux millions de personnes, Dailymotion avait «commis une faute engageant sa responsabilité civile en fournissant» à cet internaute «les moyens de réaliser une contrefaçon».

L'affaire avait fait grand bruit, l'industrie du cinéma se réjouissant de cette «grande première». Dailymotion de son côté avait fait appel.

Dans un arrêt rendu mercredi, la 4e chambre de la cour d'appel de Paris a jugé elle aussi que Dailymotion ne pouvait en aucun cas être qualifié d'«éditeur». Pour le reste, elle a adopté une position radicalement différente.

A ses yeux, la première décision revient en effet «à méconnaître l'économie de la LCEN (loi pour la confiance dans l'économie numérique) en imposant à l'hébergeur, à raison même de la nature de sa fonction, une obligation générale de surveillance et de contrôle des informations stockées à laquelle le législateur a précisément voulu le soustraire».

Tout comme Dailymotion, la cour d'appel estime que la plate-forme s'est bien acquittée des obligations lui incombant: la mise en place de dispositifs d'information et d'alerte quant aux contenus illicites, le retrait immédiat du contenu litigieux et la conservation des données permettant d'identifier l'auteur de la mise en ligne.

Déboutés, les demandeurs devront même verser 15.000 euros à Dailymotion pour la défrayer des frais de justice engagés.

Satisfait de voir consacré son statut d'hébergeur, Dailymotion préférait lundi mettre l'accent sur «l'absolue nécessité de la poursuite de la coopération avec les titulaires de droit».

«Nous sommes du côté des créateurs», martèle ainsi Guiseppe de Martino, en rappelant les nombreux accords conclus avec les sociétés de droits d'auteur et la mise en place, depuis 2007, de deux systèmes de contrôle permettant de filtrer les vidéos d'oeuvres protégées avant même leur mise en ligne.