Même si certains résistent encore par principe, la plupart des recruteurs n'hésitent plus à chercher sur internet des informations personnelles sur les postulants à un emploi.

Pour Albert Paoli, directeur du cabinet de recrutement AP Conseil, entrer le nom d'un candidat dans le premier moteur de recherche mondial Google ou le réseau social Facebook, pour y dénicher des informations, est devenu un réflexe dans sa procédure de sélection des candidats qu'il propose aux PME et PMI.

M. Paoli a longtemps résisté à cette pratique mais a finalement cédé. Le déclic: «Mon fils m'a raconté que dans son entreprise, le patron regardait systématiquement les pages Facebook des candidats. Il a même créé une fausse page Facebook pour avoir des informations sur les personnes qu'il veut recruter».

Selon une étude d'août 2008 du cabinet de recrutement Robert Half, 94% des DRH français recourent de moins en moins aux modes traditionnels de sélection, comme la vérification des curriculum vitae.

Etat-civil, études, centres d'intérêt, photos, vidéos, vie privée: Google, Facebook ou d'autres sites comme «Les copains d'avant» sont une mine d'informations pour les recruteurs dans leur quête de l'oiseau rare.

«Il est plus intéressant d'avoir des références autres que celles fournies par le CV. Internet permet de savoir ce que la personne a pu faire par le passé», dit Thierry Verdier, chasseur de têtes au cabinet 1.001 Talents.

Pour Jean-Christophe Sciberras, DRH de Pôle Emploi (Assedic + ANPE), «la tentation d'aller chercher ou vérifier la fiabilité des informations sur le candidat existe».

«Pour recruter nous passons par des cabinets. Ils utilisent tout ce qui est à disposition sur internet pour recruter le candidat qui correspond au poste», reconnaît-on à EDF.

Officiellement les grandes entreprises condamnent le procédé et disent ne pas y avoir recours.

Mais officieusement, certains l'avalisent: «Pour un poste de management, il est un peu inquiétant quand on constate, en entrant le nom du candidat dans Google, qu'il n'y a rien sur lui. Il est important qu'une personne ait une vitrine. Dans le cas contraire c'est mauvais signe», avoue, sous couvert d'anonymat, un DRH d'une entreprise du CAC 40.

«Si j'ai deux candidats en face de moi, l'un avec des articles sur Google et l'autre non, mon intérêt va être fortement tourné vers le premier», renchérit M. Verdier.

Les limites des chasseurs de tête? Ne pas rapporter tous les détails de la vie privée des candidats à leurs clients.

Des groupes comme L'Oréal ou Areva préfèrent s'approprier les réseaux sociaux. L'Oréal, qui juge «non éthique et pas déontologique» la recherche d'informations personnelles sur le net, encourage néanmoins ses salariés à présenter les offres d'emplois du groupe sur leur page Facebook, indique le directeur international du recrutement François de Wazières.

Face à la multiplication de témoignages sur des entretiens compromis par des informations encombrantes recueillies sur internet, les candidats doivent redoubler de précaution.

Après le décès médiatisé de son neveu à l'hôpital avant Noël, Issam M., la trentaine, diplômé d'une grande école, raconte à l'AFP que son refus de dévoiler son nom de famille aux médias était dû à la peur de se voir fermer les portes des entreprises.

«En cliquant sur mon nom, les DRH allaient me rattacher forcément au drame», explique-t-il.

Certains sites comme Moovement.fr ont flairé la bonne affaire. Ils proposent des services pour maîtriser et soigner son image sur internet, notamment via la création de blogs estampillés «pro».