Entre le refus de jouer les policiers et la crainte que leurs enfants soient victimes d'abus, les parents sont démunis face aux dangers des sites internet, blogues ou clavardages, illustrés par la fugue d'une adolescente de 14 ans avec un pédophile récidiviste de 44 ans rencontré sur le net.

Les fugues liées à une rencontre sur internet concernent un nombre non négligeable de fugues, 6% des cas signalés en 2007 à l'association SOS-enfants disparus.

Internet «n'est pas responsable des fugues, mais en facilitant la manipulation, il multiplie les risques de tomber dans les pièges», souligne Véronique Fima, directrice d'Action Innocence, association de prévention des dangers d'internet.

Les parents sont conscients des dangers, puisque plus d'un sur deux estiment que leurs enfants, lorsqu'il sont sur internet, sont confrontés à des contenus ou des propos inadaptés à leurs âges ou traumatisants, selon un sondage Ipsos de février 2008. Ils sont 65% de parents d'ados de 15-17 ans à le penser.

Contre les sites pornographiques ou pédophiles, les parents ont des outils, les systèmes de contrôle parental et blocages de sites. Les logiciels, mis en place gratuitement par les opérateurs depuis deux ans, bien qu'encore imparfaits, s'améliorent, selon les derniers tests effectués par l'association e-enfance.

Mais face aux dangers liés aux sites de rencontres, aux blogues, forums et clavardages, ils restent très démunis.

«Le blogue n'est pas en soi négatif, il permet à un jeune qui peut être inhibé dans la vie, de se créer un personnage plus sûr de lui et par là, de se construire», souligne Vanessa Coupez, psychologue, qui sensibilise aux dangers d'internet élèves et parents dans les établissements scolaires.

«Mais ils n'ont pas conscience qu'ils peuvent se mettre en danger ou être eux-mêmes auteurs d'abus, par exemple par des diffamations d'enseignants, un encouragement à l'anorexie, ou l'envoi de photos transformées», dit-elle.

«En théorie, ils connaissent les règles, ils savent que l'on ne donne pas d'informations personnelles à un inconnu, mais pour eux, quelqu'un avec qui on a discuté pendant trois mois sur le net n'est pas un inconnu», explique la psychologue, qui souligne l'usage abusif du terme «amis» utilisé sur des sites comme Facebook.

Pour eux, «avoir beaucoup d'"amis" ou de "contacts" signifie qu'on est populaire, mais ils ne connaissent que la moitié d'entre eux», dit-elle.

Lorsqu'elle se rend dans un collège, elle ouvre les blogues des élèves à l'avance et leur dévoile ce qu'elle sait d'eux. «Ils sont furieux, me disent que je n'ai pas le droit, et je leur fait comprendre que ce que j'ai fait, n'importe qui peut le faire».

Certains élèves racontent alors qu'ils «se sont fait de belles frayeurs» en allant à un rendez-vous et en s'apercevant qu'il s'agissait d'un adulte.

D'autres révèlent qu'ils ont été victimes de piratage de comptes MSN, de harcèlement.

«Ils aiment se mettre en scène, la grande mode, c'est de publier des photos et de demander des commentaires, certaines photos d'adolescentes sont diffusées avec des centaines de commentaires souvent vulgaires, quasi pornographiques, cela peut devenir très dur, humiliant», témoigne-t-elle.

Aux parents qui disent qu'ils ne veulent pas «entrer dans l'intimité» de leur enfant en consultant leurs blogues, elle leur explique que «le blogue n'est pas un journal intime», et prévient que beaucoup de jeunes ont un «blogue officiel» pour les parents, et un ou plusieurs autres, «les vrais», mais sous des pseudonymes.