EMI, la quatrième et la plus affaiblie des multinationales de la musique (Beatles, Coldplay, Norah Jones), a renoncé officiellement aux systèmes anticopie assortis aux digital rights management (DRM) ou, si vous préférez l'expression française, aux renseignements sur la gestion des droits (RGD) qui voyagent avec les contenus musicaux numérisés.

EMI, la quatrième et la plus affaiblie des multinationales de la musique (Beatles, Coldplay, Norah Jones), a renoncé officiellement aux systèmes anticopie assortis aux digital rights management (DRM) ou, si vous préférez l'expression française, aux renseignements sur la gestion des droits (RGD) qui voyagent avec les contenus musicaux numérisés.

L'entreprise britannique a annoncé hier qu'elle autoriserait en mai prochain le téléchargement de son répertoire désormais interopérable sur iTunes, principale plateforme de téléchargement légal mise en place par le fabricant d'ordinateurs Apple.

L'accord, cependant, ne comprend pas (encore) le répertoire des Beatles (distribué par EMI); les deux Beatles survivants et les ayant-droits de John Lennon et George Harrison s'y étaient opposés jusqu'à tout récemment, en raison d'une dispute sur la propriété intellectuelle de la marque Apple - l'utilisation de la pomme, notamment. Or ce différend entre les deux entreprises du même nom a été réglé à l'amiable au début de février, ne reste qu'à savoir quand la mise en ligne des Beatles sera possible sur iTunes.

En mai prochain, donc, les chansons distribuées par EMI et achetés sur iTunes seront désormais transférables sur l'ensemble des autres supports et outils de lectures numériques, bien au-delà de l'iPod. Qui plus est, les formats de compression de ce répertoire seront de meilleure qualité sonore - 256 kbps en format de compression AAC, au lieu de 128 kbps, norme en vigueur pour le reste du répertoire de iTunes.

L'interopérabilité et la qualité accrue de ces contenus musicaux a conduit Apple à vendre les chansons d'EMI à 1,29 $US, soit, 30 cents de plus que chaque chanson du répertoire actuellement suggéré sur iTunes.

Jusqu'à nouvel ordre, les répertoires des autres majors (Universal Music, Warner Music, Sony/BMG) continueront à transporter les DRM assortis de systèmes anticopie.

On sait que iTunes a déjà vendu plus de 2 milliards de chansons depuis son ouverture en 2003, sans compter 50 million d'émissions de télévision ainsi que 1,3 million de films.

«Nous offrons un nouveau choix aux clients de iTunes. Nous pensons qu'ils apprécieront ce choix et c'est pourquoi nous envisageons de libérer bientôt la moitié du répertoire disponible sur iTunes de tous systèmes anticopie», a déclaré pour sa part le célébrissime Steve Jobs.

Le fondateur et dirigeant de Apple estime en outre que ce consentement d'EMI à abandonner les systèmes anticopie «est le pas en avant qu'il faut à l'industrie du disque».

Rappelons qu'en février dernier, Steve Jobs avait diffusé sur le site internet d'Apple un texte à saveur éditoriale intitulé «Thoughts on Music», réflexion sur la pertinence de ces freins à l'interopérabilité que sont les systèmes anticopie. Constatant qu'à peine 3 % des chansons recensées sur le plus populaire des modèles de iPods avaient été téléchargées légalement sur iTunes, rappelant que 90 % de la musique légale (vendue en magasin) ne comportait pas de système anticopie, Steve Jobs formulait le souhait que les maisons de disques extirpent les DRM de leurs contenus pour ainsi lancer une fois pour toutes le modèle d'affaires de la musique en ligne.

Ces «pensées» sont effectivement séduisantes: sachant que les contenus ne comportent plus de DRM, les consommateurs se mettraient à acheter massivement la musique en ligne. Vraiment? Alors pourquoi cesseraient-ils de la partager après l'avoir achetée? Le consommateur ne s'en tiendrait alors qu'à ses propres outils de lecture, c'est-à-dire son iPod, son ordi et son cellulaire? Ne serait-il plus tenté de partager ses téléchargements légaux avec ses potes? Ben voyons.

Certes, l'absence de mesures techniques de protection sur les contenus légalement distribués en ligne permettra d'accroître le chiffre d'affaires de iTunes. Celui de l'industrie de la musique? Fort probablement, mais certes pas assez pour compenser le déclin des ventes physiques de CD dans les magasins.

Ce n'est pas par hasard, d'ailleurs, que la plus ébranlée des quatre majors de la musique ait accepté la première de plonger dans l'aventure alors que les autres résistent encore. Il y a un an et demi à peine, la major EMI était une des plus ardentes promotrices des systèmes anticopie.

Alors pourquoi ce changement de cap? Parce qu'il faut donner un peu de lustre à la marque EMI après le énième échec de la multinationale britannique dans sa tentative de converger avec Warner Music (il y a quelques semaines), après le congédiement de son PDG Alain Levy, après de piètres résultats commerciaux en 2006.

Et parce qu'EMI a admis qu'il fallait lâcher prise pour éviter d'être rachetée à rabais...

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