Des cuves de macération sur lesquelles sont braquées des caméras reliées à l'Internet: quelque part dans le monde, devant son écran, un client est en train de surveiller l'élaboration de son propre crû.

Des cuves de macération sur lesquelles sont braquées des caméras reliées à l'Internet: quelque part dans le monde, devant son écran, un client est en train de surveiller l'élaboration de son propre crû.

la scène se déroule à San Francisco (Californie, ouest), au sud de la Napa Valley, connue pour ses cépages, et au nord de la Silicon Valley, épicentre de la révolution informatique de ces 30 dernières années. L'entreprise Crushpad, une «jeune pousse» montée par un entrepreneur informatique, marie les deux.

Dans des entrepôts, anciennement occupés par une usine de mayonnaise, une chambre froide recèle des baquets de raisins écrasés. Dans une pièce voisine, une décoction semblable a commencé à fermenter. Plus loin, des fûts de chêne abritent la maturation du breuvage.

Chaque tonneau est soigneusement étiqueté au nom du vigneron amateur qui l'a élaboré devant son ordinateur, avant que les employés de Crushpad ne suivent ses ordres pour assembler un vin unique au monde.

«Je peux conserver mon travail de tous les jours et m'impliquer réellement dans la fabrication de vin», se réjouit Bryan Kane, un responsable commercial d'une entreprise de la Silicon Valley venu inspecter le vin que Crushpad lui a assemblé et qu'il vend lui-même.

Quelque 60% des clients de Crushpad vivent loin de San Francisco et des coteaux du centre de la Californie; son fondateur Michael Brill raconte volontiers qu'un Finlandais regarde rituellement les opérations de l'entreprise devant son écran, un verre de pinot noir à la main.

Un Japonais a même pris des vacances pour venir en personne dans la «cave», qui en est à ses troisièmes vendanges. La première année, Crushpad a produit l'équivalent de 5000 caisses de vin, 10 000 la deuxième, 15 000 cette année.

Lui-même ancien entrepreneur informatique, M. Brill espère atteindre l'objectif de 25 000 caisses pour 2007, témoin du succès de Crushpad qu'il avait lancée à la faveur d'un congé sabbatique.

La formule a séduit des passionnés du vin qui n'avaient ni le temps ni les moyens de s'installer dans une propriété viticole. Mais le modèle économique paraît aussi avantageux: la bouteille revient à entre 17 et 32 dollars, pour des assemblages des cépages parmi les plus prestigieux de Napa ou de Sonoma vendus normalement le double ou le triple.

Crushpad a également tiré avantage du «Web 2.0», qui transforme l'Internet en communauté de coopération. Le site de l'entreprise propose à ses clients une base de données de connaissances sur le monde du vin sur le modèle de l'encyclopédie en ligne «Wikipedia», des «podcasts» (vidéos personnelles en ligne), etc.

M. Brill estime être à la pointe d'une évolution spectaculaire du monde du vin. «Il existe des millions de personnes qui, si elles pouvaient participer à l'élaboration de leur propre vin, le feraient», assure-t-il.

«Imaginez qu'il n'existe aucun autre restaurant que les McDonald's et que les gens ne fassent pas la cuisine chez eux. C'est plus ou moins ce à quoi ressemble le secteur vinicole aujourd'hui», plaide-t-il.

- Le site de Crushpad